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Posts Tagged ‘MILITAIRE’

Je suis venu vous dire qu’il est parti… Et que son retour n’est pas une option ! Nous y sommes, comme à chaque fois, ce moment suspendu et furtif où en l’espace d’une seconde ineffaçable quelques mots froids solennellement alignés ouvrent une porte – précédée de trois lents, longs et secs « Toc, Toc,Toc » – avant de la refermer à jamais sur celui ou celle qui la tient fébrilement ou férocement. Je crois qu’à chaque fois que j’apporte la mort officiellement dans un foyer en pleine expectative espérant un miracle sans y croire, ma respiration trahit ce que mon cœur fuyard puis implosif nie et, durant cette partie de cache-cache lorsque qu’il ne me reste que mes entrailles pour me vider ainsi poliment devant la peine d’autrui, j’en suis à implorer la violence plutôt que le silence.

La mort est une manie incurable, une œuvre posthume, une industrie sérieuse et perpétuelle, surtout en temps de guerre, et plus on la déshumanise moins on s’en souvient. Dans mon métier, on tire avant de parler et maintenant que pour moi il n’y a plus de cibles mouvantes, j’ai du mal à reprendre la parole sans m’accrocher piteusement à la personne en état second à laquelle je m’adresse pour la première et dernière fois. Je dois faire preuve dans la mesure du possible de la plus grande des considérations administratives, mais en aucun cas de compassion fraternisante car elle me rappellerait à la vie puis à la peur pour me laisser sans ferveur ni victoire.

Quand les portes claquent de rage ou d’abandon, quand les sanglots s’étouffent mutuellement, quand l’hystérie résonne jusqu’à qui veut l’entendre, j’ai déjà tourné les talons d’un pas aérien et dans un bruit sourd. Mes yeux dans ma tête et elle-même dans mes mains, en vitesse de croisière, je prends la fuite en cherchant nerveusement mes clefs de voiture, le souffle las de tout ça, je ne regarde ma cible dans le rétroviseur qu’une fois l’envie de vomir et le besoin de pleurer passés. Il faut croire que j’ai en moi plus de regrets que de courage, la survie est à ce prix.

La bravoure apparemment ne s’achète pas, ne se loue pas, ne se prête pas, on nous la donne en médailles, en discours, en félicitations, en reconnaissances si l’on tient suffisamment longtemps pour ne plus être comme tout le monde et que l’on a la décence de ne pas trépasser pour en jouir en société. J’estime amèrement être entre les deux, normal et absent, colonisé de cauchemars qui ne sont pas les miens, persuadé que tout le malheur du monde repose sur mes épaules et que j’en suis responsable en dépit du fait que l’on ne m’a rien demandé ! J’aurais pu choisir en premier lieu les joies de l’autodestruction, mais au moins avec l’auto flagellation, j’aurais le temps nécessaire de faire pénitence envers je ne sais pas qui ou de trouver un sens à je ne sais pas quoi !

Mais pour l’heure, derrière les stries de mon verre à moitié plein, je regarde les Hommes tomber en faisant du surplace sur leur passé d’ancien combattant et de nouveau combattu. Ceux qui reviennent entiers ou pas de l’industrie de la mort gardent toujours en souvenir une partie du capital de l’usine qu’eux seuls peuvent comprendre, alors l’amour et l’amitié n’ont pas leur place sur ce chemin étroit, sinueux et incertain. Et les jours défilent les uns après les autres comme pour me narguer pour toujours, comme pour me garder sur mes deux jambes, comme pour me protéger de moi-même. Mi-temps, pause, pouce, je n’en peux plus, ce soir je vais mettre ma tête à l’envers afin d’y voir plus clair, enfin jusqu’à demain.

J’ai fait mon devoir, j’ai servi mon pays et il est fier de moi comme ils disent. J’accepte plutôt bien et je ne rouspète plus, ceci étant j’ai une menue réclamation à présenter. Certes, on ne ramène pas les morts à la vie, mais concernant mon temps, qu’en est-il, comptez-vous me le rendre ? Ce n’est pas que je n’aime pas ma patrie, mais mon répit j’y tiens absolument puisqu’il est tout ce que j’ai et, par dessus tout, ce que je suis intimement – les photographies de mes vacances diplomatiques l’arme à la main ne me vont que peu au teint ! On m’a répondu que l’armée ne pouvait rien pour moi concernant ce dossier « sensible », mais je pouvais toujours si je le désirais m’adresser au vendeur de religion de mon choix…

Le truc avec les mutations, les missions, les délocalisations, c’est que l’amour ne rentre pas nécessairement dans un kit de survie et que les relations à distance ont été créées pour la mythologie de l’adolescence où tout est pur, même la tromperie. J’aurais dû m’en douter, c’était inéluctable, c’est toujours mieux comme ça et je m’en remettrai ! Toujours est-il qu’en apprenant la patience à force de correspondances, d’illusions et de masturbations, personne ne m’avait indiqué au préalable qu’il y aurait des conséquences, tel que mon remplacement par un autre dans ton lit. Nul n’est irremplaçable, certes, mais biodégradable, là s’en est trop ! Je trouverai une autre partenaire de vieillesse, c’est sûr, mais l’amour…

Ponctuels ou retardataires, nous sommes tous égaux devant une mine anti-personnelle ! J’ai beau retourner ma scène d’héroïsme attitrée et homologuée dans tous les sens, saoul ou sobre, je n’arrive pas départager honnêtement le facteur chance de la stratégie des statistiques. Le timing, le seul et l’unique, j’ai très longtemps cru naïvement qu’il était l’une de ces sciences exactes comme les programmes télés, les soldes privées ou les déclarations de paix, mais il m’a fait faux-bond au moment où j’en avais le plus besoin, me démontrant qu’avec une armée ou un pays derrière soi, on ne peut raisonnablement compter que sur soi.

Malgré tout cela, j’ai gardé l’uniforme, par habitude plus que par foi sans doute, et puis il faut bien faire quelque chose pour être quelqu’un, pas vrai ? Quoi de plus étrange, non, en fait, quoi de plus logique que d’envoyer une personne habitée par la mort pour annoncer celle de ceux qui ont perdu leur droit à la vie ? Le visage rigide et fermé, le regard glacial et humide, la voix intangible et méthodique, je viens donner ce que personne ne veut recevoir sauf moi. Et lorsque la vie de leurs enfants, de leurs maris se termine, certains n’y voient que colère et effondrement, moi je n’y vois qu’amour…

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révolution française

1989, j’avais 9 ans et comme une envie indéfinissable d’être apatride en cette année de pré Coupe du monde.

Cette année là, le pays de la révolution en faveur des PME et PMI de l’époque s’enorgueillissait de sa justice implacable – demandez à Patrick Dils – tout en assumant à demi-mot le curriculum vitae de Paul Touvier, en attendant le plan Orsec en différé pour Hugo et une cinglante défaite à Tetris du mur de Berlin, oui encore lui.

À croire que l’on a sacrifié mes souvenirs d’enfance sur l’autel de l’amitié franco-allemande. Allez donnez-vous la main, qu’on en parle plus.

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C’était le CE2, une période chrysalide ou plutôt bâtarde entre le goût du pouvoir sur les plus faibles et la tragique réalité de ne pas en avoir les moyens, chaîne de vie.

Moi je n’aspirais qu’à profiter en toute quiétude des émanations de colles UHU, la testostérone populaire et les dogmatismes élitistes en ont décidé autrement en m’imposant de souffler 200 bougies sur une mascarade politique de plus.

Mes ancêtres n’étaient pas des Gaulois au vu des contrôles de police et en bons sauvages sans âmes qu’ils devaient être d’après l’église catholique, le concept marketing des sans culottes devaient leur paraître bien accessoire.

Le communautarisme gadget en ce temps-là n’existait pas et je ne connaissais encore que peu l’utilisation de la mauvaise foi.

Il était donc impossible d’échapper au déglutissement pavlovien et à l’unisson d’une déclaration de ratonnade à grande échelle.

Alors, la joie obligatoire que chaque élève était tenu d’arborer ne m’habitait pas, je n’ai jamais remué la queue à la vue de goodies tricolores ou aux premières notes du single national.

Célébrer un passé aux relents de Doom like ne faisant rêver que les amoureux des bruits de bottes, les vendeurs de pétards et ceux courant après n’importe quel ballon, cela m’était intimement insupportable, peut-être le syndrome du Déserteur© était-il déjà présent en moi.

Plus hypocondriaque que menteur, j’aurais pu me faire porter pale, à moins que je ne me fasse acheter contre quelques friandises et un paquet de stickers Panini.

La chaire d’un enfant est faible – redemandez à Patrick Dils !

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Au fond de la classe, prostré mais pas résigné, j’écoutais par intermittence la vulgarisation mièvre et idéaliste de l’Histoire de France dispensée de manière gauche et veule par le dernier spécimen à la mode sorti d’un IUFM.

L’instituteur de base certifié bon pour la prochaine reforme pratique la pédagogie du pleutre et la discipline d’un beatnik.

Sa mission était de créer un désir révolutionnaire chez une population estimant, à juste titre, que la démocratie et la vraie rupture avec le passé se nomme Game Boy et que l’objet fait l’individu puis les idées, à en croire la dernière publicité pour les Reebook Pump.

Avant de poursuivre, il serait bon de faire un bilan des forces en puissance. Entre ceux d’origine espagnole, portugaise, italienne, polonaise, les produits importés d’Afrique du nord maintenant implantés, et ce n’est pas faute d’avoir essayé de renvoyer le colis, les trois descendants de communistes fondamentalistes, le fan d’Henri Krazucki, plus votre serviteur l’ami chocolat, il ne restait guerre que deux Barristes en culotte courte ayant été fécondés sous Giscard pour défendre le patrimoine national, sans oublier le professeur de service prônant l’esprit républicain plus par fidélité envers sa fiche de paie que par conviction citoyenne.

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Bleu, Blanc, Rouge, il était hors de question que je me retrouve affublé d’un quelconque placebo idéologique qui insinuerait que je fusse contre quelqu’un, un étranger en particulier ou son prochain, surtout si le but est d’être en symbiose totale avec un ex-activiste de l’OAS et un Skin-Head en pleine réinsertion.

Après de multiples tractations allant de l’annulation du répertoire de l’affaire Luis Trio durant les cours de chant jusqu’à l’achat d’un vinyle des meilleurs génériques du Club Dorothée par l’école, la jeunesse, l’avenir de ce pays céda enfin.

L’affaire était entendue, la révolution française avait été achetée à bas prix et elle n’allait pas changer quoi que ce soit au programme, si ce n’est le décor, enfin pour le jour de la représentation devant les élus locaux.

Mais si les spectateurs fanatiques et occasionnels, ainsi que les acteurs pensant autant à leurs cachets qu’à la sécurité de leur emploi sont d’accord pour jouer la même dramaturgie, quitte à faire semblant, je simulerai donc du bout des lèvres tel un joueur de l’équipe de France de Football cette Marseillaise dont la violence unilatérale m’a donné le goût du Gansta rap et l’amour du « la France soit tu l’aimes soit tu la quittes ».

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