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Posts Tagged ‘histoire’

Il fait nuit nègre. La faune urbaine a coupé le son pour mieux se blottir meurtrie dans cette solitude qui peuple ceux ayant plus d’histoires que de mystères. Et au milieu de ce champ de détails, les gouttes d’eau indisciplinées s’échappent dans l’indifférence générale pour mieux s’écraser en contrebas, afin de maculer l’évier sale ou combler le vide d’un bol à l’abandon. Même à l’abri derrière mon casque de cristal, la guerre feutrée orchestrée depuis la cuisine délaissée me mine le moral, la routine et l’écriture automatique. Je cherche à me concentrer, mais je ne trouve qu’à me distraire. À force de me dissiper, je pourrais disparaitre sans que nul ne s’en doute.

Pas d’éclair de génie préfabriqué, ni de révélation divine et encore moins d’inspiration sous influence. Je pars à la rencontre de mes entrailles en me débarrassant tant bien que mal de ma cervelle de substitution, de mon âme de location pour cerner ce que j’ai dans le ventre. Enfin, ce qu’il en reste.

Pour ainsi dire, c’est peut-être tout ce que je cherche lorsque j’extirpe de leur enclave toutes ces images logées dans mon passé afin d’aligner l’intégralité de l’alphabet dans un désordre parfait. J’offrirais bien au monde ma lobotomie en direct, si seulement cela servait à quelque chose ! Mais l’horreur est à la mode et mon égo ne croit pas en la postérité. Il n’y a que maintenant. Alors, je serre le robinet jusqu’à ce que ses angles droits s’impriment sur ma paume, puis je retourne dans le bureau, l’autre main dans mon boxer.

La porte une fois claquée, je fais le tour du propriétaire en faisant du surplace. Des murs vaguement capitonnés de Velleda et une fenêtre pour épier les ombres de mes contemporains vivant dans le futur proche. Il faut croire qu’avenir rime avec électronique vu le monticule de plastique qui meuble leur vie. Mais au bout d’un moment, les lumières se retirent, les ombres les quittent et le noir étend son empire. Rideau. Circulez il n’y a plus rien à voir, à épier, à emmagasiner pour tout recracher entre l’ascenseur et la machine à café. Devant tant d’obscurantisme technologique, je retourne à mon trône d’usine dans l’espoir d’asseoir ma suprématie sur le futur !

Des post-it scarifiés, usagés, des relevés de compte dépressifs, un cimetière de cure-dents mâchouillés, je laisse des indices au fur et à mesure de ma dépression collaborative. Je suis dans le brouillard. J’aimerais avoir des warnings pour faire une pause, mais je n’ai qu’un phare. Donc je le poursuis.

Le voilà, lui, l’écran qui tient en otage une civilisation entière de pixels, il m’illumine comme il le peut tandis que ma colonne vertébrale joue son récital en craquant de toutes parts, histoire de me rappeler qui tient qui ! On ne sait jamais, si je me sentais pousser des ailes, à défaut d’avoir des racines…
Je suis prêt ! Mais à quoi au juste? Peut-être à tout, en fait sûrement pas. Avant de déplier mes pattes de plantigrade, il me faut grogner pour faire appel à la bête en sommeil, celle qui vit entre l’instinct et l’instant. Ici et maintenant.

Premièrement, j’ouvre, puis je tape et enfin j’enregistre. La liberté n’a jamais autant ressemblé au travail la chaîne. Enfin, nous y voilà, un texte de plus, des virgules en moins, les lettres à la bonne place, les mots justes, les phrases de circonstance, une illustration adéquate, le même nombre de tags et l’inévitable vidéo pour le référencement, j’y suis. Mais où ? Non, je me suis perdu, car il n’y a plus rien à raturer. Si même mon crash-test suit dorénavant les règles de la nature, je ne vois que l’auto-destruction comme projet d’avenir valable. L’ennui est une honnête erreur, mais l’oisiveté est un aveu d’échec sans motif acceptable. Je fais le tour de ma petite planète qui me sort par les orbites et essaye tant bien que mal de me faire passer pour l’un de ses satellites.

Après deux ans de cahier de brouillon, j’ai fini par remplir toutes les pages, la couverture, le dos, chaque marge et bas de page. Il ne reste rien, plus de place, mais je ne faisais que m’échauffer, que m’entraîner, qu’envisager. L’essai est transformé, mais l’expérience est encore trop loin pour je puisse l’écrire. Pourquoi parler de but et de fin, alors que je n’ai pas encore commencé ?

Mes amis, il l’heure de tout quitter pour avancer, prendre l’horizon à témoin sans se retourner entre l’essence et l’allumette. Je vais mettre le feu à ce blog pour vous en faire un souvenir et moi un mémoire. Et au petit matin, la fumée à l’agonie sous la rosée et l’aube en retard, j’irai planter mes racines ailleurs – mes premières – afin de coloniser d’autres espaces sous une autre forme au fond…

 

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Je n’arrive pas à choisir entre l’histoire et la mémoire
(Le coeur 0 – La tête 1)

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Je n’arrive pas à choisir entre un puzzle de mots et un cadavre exquis
(Un moratoire 0 – Une histoire 0)

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Je n’arrive pas à choisir entre la part d’intimité et la part d’humanité
(Mémoire 0 – Histoire 1)

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À 15 ans si j’avais su que le Punk se trompait et qu’un autre futur était possible, j’aurais jalousement préservé ces tickets de bus, feuilles volantes et autres carnets à spirales, petits et grands carreaux. No Future. Je ne pouvais décemment pas avoir un cahier bien sous tout rapport, avec sa protection et mon état civil. L’écriture, d’aussi loin que je m’en souvienne, est liée chez moi à la transformation et la disparition.

En somme, prendre quelque chose pour en faire autre chose, mais sans espoir de retour. Poser des mots fuyant de mon esprit était un acte irrévocable, je ne les retrouverai plus dans l’état où je les avais connus. Par conséquence, à une psyché cauchemardesque ne pouvait résulter que du papier défiguré, déstructuré, troué et noir. Puisque ces bouts de papier parlaient mieux que moi, il fallait qu’ils me ressemblent comme l’encre maculant mes mains et les poches de mon jean.

À l’époque je passais mes journées, mes nuits et mon sommeil à improviser – entre l’absurde et la psychanalyse – dans ma chambre à partager, sous la douche souvent froide, dans la rue outrée, à la place du mort enivré et même au fond du bus les pieds sur le siège, dans la plus grande illégalité. En prenant racine dans les transports en commun, j’ai été plus honnête avec mon prochain que je ne pourrai l’être aujourd’hui. Des phrases sans verbes inventés, des slogans remodelés, des épitaphes proférées, des onomatopées éructées, des expériences phonétiques, tout était bon dans la diction muette ou vociférée. Tout dépendait du volume de mon walkman.

Et parfois, par hasard, lorsqu’une succession de mots retenait plus qu’une autre l’attention de mes contemporains, amusés ou excédés, je cherchais entre les sièges le ticket sacré où j’inscrirai ce moment unique échappant déjà à ma mémoire. Fallait-il encore que je puisse me relire. Enfin quand par miracle, c’était le cas, je ne savais que faire de tous ces mots anonymes, ces flashs collectifs, ces histoires déjà vécues, ce temps volé.

Pour tout dire, j’allais le plus souvent possible en ZEP les mains dans les poches, mais avec un stylo bille. Et oui pourquoi s’encombrer d’un cartable puisqu’aucun des devoirs exigés la veille n’avait été exécuté ? Pour ma défense je prévenais toujours l’autorité en présence de mes futures intentions, quelques fois même en laissant un ticket de bus. À chacun sa signature.

Expulsé manu militari en début de cours, je fouillais ainsi dans mes poches afin d’y quérir ces fragments de mémoire, ces instantanés autonomes, ces pièces de mon histoire que je considérais à tort comme une affaire résolue. Pour moi le temps était juste un mauvais moment à passer et la vie ressemblait à la Toussaint. Alors, avoir une Histoire et bâtir un avenir cela n’avait rien à voir avec du papier et un stylo, personnellement je n’avais rien à raconter, je voulais simplement ne pas crever sans rien laisser. Et c’est donc en heures de colle que j’ai réalisé tout cela. Dans ce moment suspendu entre usine et discipline, je devais écrire ce que l’on m’avait ordonné sans compter qu’on me faisait perdre du papier et de l’encre. Et aussi, mais cela je n’osais le penser, on me faisait perdre du temps. Il me fallait l’écrire dorénavant. Sur un mur, dans un micro ou sur un blog !

À bien y penser, je ne sais pas combien de stylos j’ai «emprunté» pour construire ma carapace d’antan, mais il m’en faudra plus encore pour la démanteler.

Pendant fort longtemps, je me demandais où était passée cette bibliothèque de petits papiers pliés, froissés, empaquetés, collectés. Objectivement j’ai plus de souvenirs d’eux qu’ils n’en ont de moi. Le désordre doit être la clé de tout cela, celui-là même me permettant de tout dire, de tout penser sans de soucier de rien, il reprenait son dû afin que je ne puisse jamais m’arrêter. Pour mon bien paraît-il ? Mais comment opérait-il et surtout quand me délestait-il de mes biens ?

La réponse se trouvait chaque dimanche où la messe et moi avions rendez-vous. Et chaque fois, il était plus ou moins question de donations en amour inconditionnel, puis de leçons à réciter pour les appliquer au quotidien. Je jetais donc cet amour propre avant qu’on ne me le prenne, ainsi que tous les tickets amassés durant la semaine pour, je pense, tout oublier et recommencer les mêmes erreurs. Une fois encore. Si j’avais appris trop tôt de ces bouts de papier dans quel monde j’étais assigné, je doute que vous puissiez me lire à cet instant précis.

Et aujourd’hui encore machinalement lorsque je passe à côté de l’église en bas de chez moi, je vide mes poches pour survivre.

Reload

Ps 1 : Récemment je n’arrivais pas mettre la main sur un article écrit pour le blog et pour cause : à présent, je ne perds plus rien, excepté lors d’un suicide de disque dur. Oui, j’ai tout en mémoire, à portée d’index, suffisamment de fichiers Word/Pages/OmmWriter updatés pour qu’ils ne sachent plus qui ils sont. J’ai tout je vous dis, mais ne me demandez pas quoi précisément, je ne saurai pas vous répondre. J’ai déjà tout oublié, je prends bien note de cela sur un bout de papier que je jetterai…

Ps 2 : Tant que je m’en rappelle, votre blog et mon cahier de brouillon vous proposeront un tête à combiné dans une cabine, de la poésie qui s’anime sans personne et la suite de Bagdad Café ?!

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Cette semaine, au programme de ma boite crânienne :

Samedi 8 : “Rythme(s) & Mécanisme(s)” S03 E03

Dimanche 9  : Explicite, lyrique et sans complexe (1) ?!

Mardi 10 : Le Retour De La Revanche De La Suite (0) Bagdad Café

Prenez le temps, avant qu’il ne vous prenne

Foutraquement…

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Jadis, je croyais fermement qu’il fallait crier pour aimer et suivre les ordres pour être aimé. Petit, avant que je ne prononce moi-même mon nom pour savoir qui j’étais je n’existais que dans la bouche de mon père, à l’époque où le monde tournait outrageusement autour des silences rhétoriques et de son regard rédhibitoire. Chacune de ses paroles assenées avec affection, mais sans le packaging, retentissait dans ma petite planète – faite de jeux d’adultes et d’innocence dérobée – comme le jugement dernier. Et celui-ci ne s’interromprait pas tant que l’homme château de carte qui donnait un sens à mes peurs ne s’en retournerait pas sur ses talons afin de trouver des mots pour comprendre sa propre violence.

Après avoir goûter, sans vraiment m’y habituer, à ses coups de tonnerre pour la énième fois, j’étais comme fasciné dès qu’il me regardait presque absent, mais totalement présent du haut du monde de ceux qui savent déjà tout mais qui n’apprennent rien. Lui, le père, ne savait pas s’il devait rire d’espérance ou pleurer de résignation en posant les yeux sur sa progéniture, sa créature, sa boîte à souvenir, à avenir. Je ne voulais pas le décevoir, comme si cela était possible, souhaitable, mais je n’ai jamais compris ce qu’il voulait en faisant tomber la nuit sur moi et lui non plus au bout du compte, pensais-je. Alors, nous nous taisions en soufflant en canon et c’était bien ainsi…

Parfois, lorsqu’il perdait pied dans sa réalité, il arrivait à s’extirper subrepticement de sa retraite faite de silence avérés et de sanglots refoulés. Comme tous les Hommes, il cherchait de manière psychotique des vestiges de la mère que je ne connaissais pas – la sienne ou la mienne – pour lui venir en aide, pour lui donner la force nécessaire, pour avoir de quoi croire juste un jour de plus. Demain n’existait pas pour lui. Mais il fallait s’y préparer et y survivre coûte que coûte, uniquement pour recommencer le jour suivant jusqu’à en avoir assez des pourquoi ! Je n’étais pas sûr de comprendre tous les tenants et les aboutissants de cette lutte que je ne voyais pas chez les autres, mais elle était notre héritage et je le porterais bien assez tôt.

Le temps, qu’on le veuille ou non, on le subit et pire on le regarde faire, une main dans le dos sans rien dire parce qu’il n’y a rien à expliquer, à demander, à combattre. Il faut juste vivre avec, voilà à peu près ce que mon père voulait me laisser comme mémoire en s’obstinant sans plaisir à ne jamais me donner le mode d’emploi de l’épreuve qu’il m’imposait. L’an 1. Le jour où il a voulu m’apprendre à nager en me catapultant sans mon autorisation dans un étang qui ne s’était pas lavé. J’aurais pu me noyer, j’aurais dû, j’aurais pu nager, j’aurais dû, finalement j’ai flotté, mais l’eau, elle ne s’en est pas enquise et ma leçon était donc celle-ci ! Alors, c’était à moi de voir si je voulais abandonner ou continuer jusqu’au jour où je perdrai comme tout le monde.

En outre, dès qu’un bref et rare moment d’évasion fantastique s’offrait à moi en levant la tête vers les nuages en perpétuelle mutation, mon père ne pouvait s’empêcher de les étrangler de ses propres mains sous mes yeux, naturellement. Comme pour me faire rudement comprendre à sa manière qu’il n’y a rien à voir là-haut, circulez, parce qu’à y prendre goût trop rapidement, trop souvent, on ne sentait pas la chute et je finirais par ne voir que le sol en le prenant à témoin de mon mode de vie. Mon champ de vision devait se résumer désormais à droit devant, sans espoir de regarder en arrière. À force, j’allais devenir fidèlement ce que je vivais tant bien que mal et certainement pas ce à quoi que je rêvais les yeux grands ouverts durant mes crises de bonheur idéal. Du coup, je ne connaissais pas la déception !

Avancer, avancer, c’était le maître mot avec lui, avancer toujours et encore, sans s’embarrasser d’un quelconque but qui ne parle qu’aux croyants, sans s’encombrer de qui que ce soit qui ne s’adresse qu’aux vivants. Je crois, enfin, je doute que mon père n’ait jamais eu confiance en une autre personne que moi et le drame, c’est que je ne connaissais définitivement pas le sens de ce sentiment, car on le comprend qu’une fois qu’on nous l’a ôté, donc il a dû partir.

La dernière fois que j’ai vu mon père me parler avec le visage déformé à l’extrême, les cordes vocales prêtes à se déchirer, les veines proéminentes, les tempes puis le système lacrymal au bord de l’explosion, il essayait inlassablement de m’enlacer tout en m’écrasant,  me donner quelque chose tout en me l’imposant, étrangement, rien à avoir avec un présent qui offre un sourire en prime, mais plutôt une part de sa prison, interne, enfantine, amoureuse où la liberté – dont il aimait à promouvoir ses vertus en tempêtant – n’a jamais aussi bien résonné. J’aurai tant voulu lui donner une clef, la bonne, une porte de sortie, l’unique ou bien un morceau de mes nuages en échange de son trouble, ce bourdonnement incessant, persistant, assourdissant et dépourvu de trêve qui était le sien depuis son enfance soldée sur l’autel d’un père qui n’en était pas un.

Moi, le mien de père, il en était un, il n’avait pas besoin d’être un quelconque héros puisqu’il était là. D’autant que je m’en souvienne et plus je fouille dans ma mémoire morcelée pour avancer vers mon destin déjà bien ficelé plus il me reste des clichés au détail près de paysages défilant sans discontinu les uns après les autres. Mais il n’y a personne pour les habiter, si ce n’est la voix de mon père qui supervisait la visite guidée – aussi confuse que rassurante – de ma psyché en convalescence depuis l’enfance. Et dans ces moments là, touché par la grâce, le trouble, mon trouble s’efface de ma prison sur mesure, à croire que le bourdonnement incessant, persistant, assourdissant et dépourvu de trêve, c’était les autres après qui l’on court toujours et qui ne nous rattrapent jamais !

J’ai dû perdre la faculté apparemment obligatoire d’aimer, le jour où mon père a préféré me quitter durablement au lieu de fuir encore une fois, droit devant. Je n’ai pas eu le luxe de me retourner sur ses pas pour lui dire au revoir, il a fait en sorte qu’il soit déjà trop tard. Il m’a donné ce jour là l’amour qu’il n’avait pas, enfin, je ne sais pas, je crois, je le demanderais certainement à mon tour à mon fils quand je ne serai plus, peut-être que lui il m’entendra…

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Le syndrome de la page blanche et moi nous ne nous sommes jamais rencontrés, malgré le fait que l’on m’en parle et qu’on me le vende si souvent. A l’instar de Dieu ou de la démocratie, j’en viens à douter de son existence même.

Je n’ai pas en moi une nature de retardataire, de celle qui flirte nonchalamment entre la chronophagie et la mythomanie, le sourire aux lèvres. Je ne vais tout simplement pas à mes rendez-vous tout en prenant un soin méticuleux de ne pas prévenir et d’encore moins répondre au téléphone – « signe d’oppression de mon peuple », désolé je ne suis pas assez malhonnête pour placer cette expression dans un contexte historique alors je la mets n’importe où, voilà c’est fait – accompagné de con cortège de Sms ressemblant plus à des rébus qu’autre chose.

En travaillant sur ce blog, parfois cahier de brouillon souvent papier buvard, j’ai appris avec le temps à lutter avec ma mémoire récalcitrante forcement sélective et effectivement détériorée par l’absinthe que l’on sert du côté de Fribourg, le rhum de Martinique en bon professionnel s’est chargé de mon foie.

De plus j’ai la profonde conviction que les morts – peu importe leur statut dans mon organigramme – prennent un peu de mon passé en carton-pâte, sans prévenir, avant de devenir du vulgaire marchandising pour nos souvenirs tenant autant à la morphine qu’au morphing.

En revenant en arrière dans chaque article pour occulter le fait que le mur me fonce dessus sans sa ceinture de sécurité, je trouve presque plus de questions inachevées que de réponses toute faites et c’est pour cela que je creuse consciemment cette tombe à la mesure de mes trous de mémoire, histoire d’emmener tout le monde avec moi le moment venu.

Je pourrai consulter, mais je rechigne à ce qu’un quelconque praticien soit contraint à payer l’ISF. Et puis, me complaire dans l’une de ces médiocrités artistiques où la dépression est érigée en rang de talent, merci, mais non merci! Mes morts finiraient par sortir de leur retraite pour me rappeler qu’on ne mange pas de ce pain là, d’où je viens.

Bref, plus je me remémore, plus je préférerais imaginer quitte à vivre moyennement heureux avec ce mensonge, plutôt que d’épouser ce background qui me ressemble un peu trop et qui donc forcément ne vivra jamais en paix.

Je pourrai ne plus rien trouver à écrire et faire semblant, le bonheur tient parfois à cela, mais franchement je préfère mon histoire à celle qu’on me vend, et puis quel plaisir d’abuser de votre temps.

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Rentrer chez soi…

En voilà un concept original, comme si l’Homme était conçu pour être sédentaire, comme si l’homme était programmé pour être monogame. Cependant la société des gens heureux et du bonheur prêt-à-porter est passée par là et la machine humaine ne connaît pas la pitié – si elle n’est pas rentable – particulièrement envers ceux qui tentent de ne pas suivre scrupuleusement le mode d’emploi du sens de la vie. J’aime avoir toujours les mêmes habitudes, mais jamais au même endroit et encore moins avec les mêmes gens.

En général ma manière de vivre les irrite plus que ma façon de penser. La simple évocation de l’idée que je n’engendre pas du temps comme un cadeau divin parce que je ne fais que le traverser de part en part, elle remet en question les gens tout en les confortant. Mais on ne peut décemment pas porter tout le monde dans son sac à dos et encore plus, sa propre mémoire. Si je ne peux me souvenir de moi même, je n’aurai plus rien à regretter !

Pour moi, l’échec est semblable à un contrôle interminable derrière une famille fuyant leur chez eux pour les vacances, à un retard sur un vol qui produira le manque de mon scotch au bar déjà désert, à une réservation d’hôtel mal enregistrée qui annoncera une vengeance prochaine en faisant droit de privilège en doublant légalement dans les files d’attente. Ha ! Oui, je sais, les gens dans tout ça ? Hum, ils meublent avec plus ou moins de succès mon temps de transit entre deux échappatoires.

Justement en parlant des « gens », les seuls, les vrais, les uniques et irremplaçables, pour mon travail salutaire, j’en croise souvent, j’en croise beaucoup, j’en croise trop à vrai dire. Sachant que cette overdose d’humanisme garantit à elle seule mon mode de vie, je consens à mettre tout mon cœur lorsque je fais le tour du pays pour annoncer à ces personnes, avec leur vie sur le visage, qu’elles sont licenciées. Une fois la sentence assenée – nette, sans bavure et avec un sourire compatissant en option – je les vois hébétés, en colère, absents, effondrés, autant de choix qui les empêchent d’avancer suffisamment vite pour ne pas disparaître de l’organigramme du grand dessein.

À toute épreuve à handicap, le seigneur pourvoit une récompense à la mesure du sacrifice, alors dites merci à la culture de votre entreprise pour laquelle vous avez donné, sans poser de questions, les meilleures années de vos existences car elle vous propose un plan de résurrection en plusieurs étapes. Ne nous remerciez pas. Donc pour revenir parmi nous un jour, il faut que vous nous quittiez définitivement.

La manière dont on part est aussi – si ce n’est plus important que tout – ce que l’on a fait auparavant. J’aime à penser que les additions ne font pas le résultat. Pour certains leur emploi est tout, un but, une famille, un foyer et au moment de dire adieu à ce morceau d’eux qu’ils ne récupèreront vraisemblablement plus, je leur demande de fermer les yeux une minute car, à tout regarder comme si chaque chose autour de leur open space était primordiale, ils en oublient vite leurs priorités.

Personnellement, la famille, ma famille, cela n’en n’était pas une, disons que cela fait partie d’un pack à l’origine et du décor au bout du compte. J’ai des liens avec les miens, de ceux qui sanglent pour mieux m’aimer et qui me ramènent à chaque fois à ceux qui meurent du temps qui passe et qui portent mon nom. J’ai beau fuir aussi vite que l’avion le peut, elle me rattrape toujours.

Ne pas mourir seul, cela paraît être la seule obsession raisonnable, mais de la part des vendeurs d’amour à tout prix qui font de leur hygiène affective une morale à toute épreuve, je trouve cela d’un égoïsme dont seul les solitaires devraient se prévaloir. Apparemment, c’est ça l’objectif trouver quelqu’un, une fois qu’on l’a, il faut évidemment produire d’autres quelqu’un sous peine de s’ennuyer avec le premier quelqu’un. Je crois en la loyauté, l’honnêteté ça ne dure que le temps d’une pause café ou d’une partie de jambes en l’air, voire à l’horizontale. On aime couché, on cohabite debout.

Les gens, encore eux, ont un besoin maladif de savoir d’où les autres viennent, comme si l’on était condamné à n’être qu’un échantillon de notre passé. Je vois si souvent le monde d’en haut en classe affaire que j’en oublie le nom des terres en dessous. Mais si vous voulez savoir, moi, je viens d’où je suis maintenant.

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Je ne vais pas te raconter des histoires qui finissent bien et que tu connais déjà trop, je préfère que tu le fasses à ma place, moi je sais encore croire. Emmurée à même ma convalescence pour cause d’apesanteur capricieuse, je hante à cloche pied, gaiement, ces couloirs muets d’avoir suffisamment hurlé où la mort devient le seul ami à qui tu dis la vérité vraisemblable.

Un matin, par accident –  un de ces accidents dont on crédite à tord le destin – tu m’as tendu la main que tu avais oubliée, comme ça sans rien dire, sans rien faire, depuis ce lit qui a poussé sur ton dos et qui ne veut décidément pas te quitter. Je suis rentrée dans ta tête remplie de bobines, en sautant à pieds joints entre ton delirium tremens et ma dépression raisonnable.

Peu importe où ta folie ordinaire me fait sombrer – de fantaisies militaires en voyages héroïques – je veux la fin de ton mensonge parfait bien plus que la suite de ma vie prévisible. Tu parles si bien de vengeance avec l’Amour perdu à jamais pour excuse pardonnable, alors j’ai pris part à cette guerre sans ennemi valable qui n’est pas la mienne, ni celle de personne d’ailleurs.

La guerre, elle a l’habitude de construire des morts à la chaîne et d’abonner des prisonniers à la perpétuité. Toi, tu es le tien en parlant la langue du chagrin comme une aventure heureuse qui ne peut être comprise qu’une fois vécue. Mais une fois la nuit tombée plus bas que terre, le sommeil ne te trouve pas, trop occupé que tu es à combattre ton tourment sur mesure, sans jamais vouloir réellement le toucher de peur qu’il n’existe plus.

Moi, mes nuits – sans Morphée, ni morphine – étaient habitées par ces héros impossibles et accrochés désespérément à tes lèvres, celles qui me rappellent que les rêves demeurent tout ce qu’il nous reste de nos âmes au réveil soudain. Parfois, nos songes endormis jalonnent nos maux originaux et nos maladies imaginaires de fenêtres de tir pour mieux partir au loin, là où la médecine moderne ne pourra pas nous rattraper. Je ne connais pas la souffrance, j’ai juste mal, mais ça passera. Et toi, comment ça va ?

L’Amour, je te dirai qu’on ne le perd jamais, on l’abandonne pour de plus ou moins bonnes raisons parce qu’oublier pour toujours, c’est toujours mieux que de se rappeler de temps à autre que l’on est vivant. Toi tu en parles si facilement sans le connaitre dans une langue étrangère, derrière un masque, au-dessus de tout le monde.

Tu confonds souvent « être bien entouré » et « vivre dans des remparts », mais la vengeance qui t’a donné des compagnons d’infortune, elle les reprendra lorsque la douleur sera plus forte qu’elle ou quand tu ne sentiras plus rien. Certes je déforme la réalité moi, mais je ne la trahis jamais comme toi.

Je joue la comédie, tu fais ton cinéma, tu me vends et je restaure un monde qui n’est qu’un prétexte à notre vie commune, je suis ce petit rien qui te leste ici-bas dans le camp de vacances de l’au-delà entre course de chaises roulantes et concours de perfusions. Tu sais, toi, un jour quand je serai grande – grande comme ça ! – moi aussi j’aurai un dentier comme ceux qui ont plein de plis sur le visage et je pourrai arrêter de cligner des yeux pour voir le monde comme il est apparemment, le monde de « tu verras quand tu seras grande ».

J’aimerais me dire que je resterai un souvenir qui offre des fossettes immobiles dans ton monde où les images défilent une par une, mais ne restent pas. Je continue notre spectacle – mais cette fois c’est moi qui suis sur le lit – à deux voix et quatre mains avec ces liens qui ne tiennent à rien pour écrire mon manque, tu sais celui de plus tard, ton absence en forme d’ombre et de flashback, orpheline de ce temps cherché, d’une enfance enterrée dans l’espoir de la faire pousser.

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Je n’arrive pas à choisir entre le conditionnel futur et le passé simple
(Les phobies 0 – Le révisionnisme 1)

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