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Mon anniversaire avait une fois de plus avalé son bulletin de naissance. Culs de bouteilles fracassés sur le bitume, concours d’immolation de bougies et bile pour tous. De la célébration à l’autodestruction il n’y a qu’un pas !

La rentrée était déjà bien déflorée et les charlatans en tout genre offraient leur croupion, au nom de l’art, à qui voulait bien l’acheter chez le disquaire ou chez le libraire. Rien de nouveau en somme, si ce n’est les feuilles guettant l’arrivée légitime de l’automne pour un suicide collectif.

Pour tout vous dire, je n’avais pas le caractère d’un boy-scout, ni l’ambition d’un mouton et encore moins la mentalité d’un oncle Tom. Alors lorsque mes congénères se promenaient fièrement et libres, un diplôme autour du cou en direction d’une voie universitaire et d’une intégration par l’argent à la clé, je soufflais et haussais les épaules. Je ne pouvais me résoudre à prendre ainsi ma place dans l’abattoir républicain ! Et après une fraction de seconde de réflexion, j’avais décidé de mettre un terme à ma carrière scolaire avec un C.A.P. pour tout héritage et un mépris certain pour les vendeurs d’égalité et de chance. Les dés sont de toute façon pipés. Excepté que moi je ne joue pas, j’épargne… Enfin j’épargne les tricheurs. Entre la laisse institutionnelle et les liasses criminelles, j’avais décidé de ne pas choisir tant que mon ventre m’en donnait encore l’opportunité.

Ce jour là, j’étais au magasin, il y avait un show-room ?! Oui j’étais devenu vendeur sur un malentendu, avec mon sourire de croque-mort et ma chaleur reptilienne, j’avoue avoir eu tous les éléments pour ne pas survivre à ma période d’essai. Mais le patron des lieux m’a gardé, enfin, m’a gardé une place sur son étagère entre sa bourgeoise de l’ouest lyonnais, son criminel d’oncle mi-boxeur mi-ballerine et quelques signes extérieurs de détresse pour nouveaux riches. Il accomplissait ainsi le rêve de sa vie : avoir un pote noir… À chacun ses frustrations.

Je n’en demandais pas tant, que mon employeur soit ma pute. Il lui fallait un point de vue nègre sur quelque chose. Cette fois la nouvelle moquette qui supportait son canapé blanc dans la réserve du magasin était en question, la même que dans Scarface ! C’est vous dire les ambitions culturelles de l’intéressé. Bref, loin de moi l’idée de lui indiquer que Mondial Moquette n’avait aucunement contribué à la mystique du film de Brian DePalma. Mais bon, ne rien foutre de l’après-midi était un projet de société comme un autre.

En déambulant l’oeil hagard et la digestion omnipesante dans les allées et les aléas d’un monde moquetteux, j’avais perdu la notion du temps et l’espoir de revoir la lumière du jour avant son terme. J’avais l’impression de tourner en rond, un genre de piège à con entre le marathon et le labyrinthe.

Mon patron s’adonnait à son jeu de prédilection, l’auto-satisfaction ou comment avec le carnet d’adresses de papa et l’argent de maman construire de ses propres mains un empire dont lui seul connaissait l’existence. Dans ce petit monde, tous les «ils» et les «eux» voulaient devenir lui, le «Je» !

Avec l’expérience je finissais par glisser avec une certaine maestria les «hein, hein», les «c’est clair» et les inéluctables «t’as raison», histoire d’achever les digressions de sa masturbation à poumons déployés. Lorsque soudain la séance de sucess story s’interrompit par l’arbitrage de mon portable.

À l’autre bout du fil mon acolyte, Doudou pour les intimes. Alors que nous avions rendez-vous au playground derrière la Part-Dieu pour une partie de street-ball sans foi ni loi, l’intéressé me rétorqua qu’il ne pouvait pas y être, d’une voix angoissée, agacée, effrayée et franchement nerveuse.

Une fois le silence passé et devant mon ironie coutumière, Doudou prononça lentement la sentence :

« – Des terroristes ont fait exploser le World Trade Center avec un avion…

– Arrête tes conneries, tu t’es pris pour Joel Silver ou quoi !? Dis moi plutôt que tu as prévu une partie de bagatelle sur fond de R-Kelly à l’arrière d’une voiture, hein ?

– Non, Sylvain —rares sont les fois où mes proches perdus dans mon enfance m’appellent par mon prénom— il y a eu un attentat à New York, les tours jumelles ont explosé, comme ça, comme je te le dis, c’est tout. Nous sommes en alerte orange à la caserne, nous devons nous préparer au pire. Je vais faire tout mon possible pour rassurer les gens, on reçoit des appels de panique depuis une heure. Je ne sais pas comment va finir cette histoire encore, mon frère. En fait, je ne veux pas le savoir. »

Je crois que c’est l’une des dernières fois où je lui ai parlé, la faute au temps. La faute à la dictature du choc des civilisations.

La haine populaire nous a écartelé jusqu’à nous séparer. Pfff, je crois que ce jour-là ma barbe et moi sommes devenus musulmans dans le regard des gens, cela sonnait comme une promotion dans leurs pupilles à vrai dire. Le bamboula les faisait rire, le barbu silencieux, non !

Quant à Doudou, il n’eut plus le luxe de sourire. Difficile d’être pompier et de s’appeler Rachid juste après le 11 septembre…

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« Jeudi, 30 Août 2001, minuit pile, terrain de basket-ball derrière la Part-Dieu, fin d’une partie en solitaire, pause gorge sèche et poches vides»

L’été fut meurtrier et la vérité ne fait pas de prisonnier. Et puis l’amitié pris tout son sens dans la trahison parce que l’amour ne tient qu’à un préservatif. Quant à la mémoire, elle s’arrangeait de nous pour mieux nous survivre. Alors je l’écrivais puisque les mots n’arrivaient plus à sortir de ma bouche.

2001 l’odyssée de l’espèce, l’année de tous les viagers où j’ai commencé à cotiser au nom du conditionnel et de ce réflexe pavlovien communément appelé «bonheur». J’y ai perdu mes dernières illusions, pas mal d’ambition, un peu de ma passion, tous les membres de ma famille d’adoption et beaucoup trop de Kleenex. Voilà pourquoi il n’y avait plus personne pour scorer avec ou contre moi ce soir. Pas d’épaules sur lesquelles se reposer et encore moins  de regards francs pour se rassurer. Rien. Il y avait juste cette persistante impression de deuil, sans savoir encore vraiment ce que l’on a perdu. Et ce pour combien de temps ? Pour tout le temps !

Tout autour de cet instant, une épaisse et envoûtante pénombre jonglait avec un trio de réverbères pour donner un peu d’espoir aux imprudents visiteurs de son mystère. Parfois on ne revient jamais du noir. Personnellement, je l’aime, enfin je l’apprécie assis, las et résigné. Je le vois sans l’apercevoir. Je l’effleure constamment. Il m’entoure, m’enterre, me fait taire quitte à tout oublier. Et dans ce silence total, honnête et précieux, je sentais de la vie là où l’on en voulait pas, sous mes paumes, sur le cuir de mon ballon de basket-ball usé et rugueux. Je crois que ce soir là, j’ai commencé à donner des noms aux choses en leur parlant et elles de me répondre.

Je l’ai serré dans mes mains déjà tendues, crispées et tétanisées. Je l’ai pressé, secoué, empoigné, pressurisé, puis relâché du bout de mes empreintes digitales. Mais il n’a pas bronché, il est resté le même. Froid, calme et flegmatique. Chacun de ses rebonds arbitrait le temps qui résistait dans la pénombre et dans son ultime saut de l’ange —avant de rouler péniblement au ralenti— le ballon me demanda pardon :

« – Je suis désolé, pour toi, pour ta perte… Pour la fin, enfin pour tout ça à vrai dire…

– Hein, ha, tu crois vraiment que tu me parles ? Hein, tu le voudrais, mais en vérité, je suis simplement fou ! Fou de rage ! Fou de haine ! Fou de vide ! Et pourquoi me présentes-tu ton mea culpa au juste, Monsieur de cuir estampillé NBA ?

– Appelle-moi par mon nom, je sais que tu m’en a donné un… Prononce le, cela te fera du bien… Tu pourras passer à autre chose… Tu pourras tout oublier et même mentir…

– Sdl*, c’est ton nom, voilà, t’es heureux maintenant ?! Tu veux un médaillon et un peu d’eau bénite ? Mais sache que je ne veux pas aller bien, je ne veux pas oublier, je veux que tout s’effondre quitte à m’ajouter à la liste des décombres !

– Et pour quoi au final ? Une petite vengeance fraternelle ? La recherche sans fin de l’égo perdu ? Des coupables à blâmer ? Des cibles à atteindre ? Une reconquête à planifier ? Les choses sont faites pour se terminer partenaire, sinon elles ne sont plus des évènements et encore moins des sentiments ! Et à partir de là, il n’y a plus de temps et plus de conjugaisons pour combler les mémoires…

– Bravo, j’applaudis ! Splendide, merveilleux, profond, touchant ! De la merde oui ! Tu vois cette lueur dans mes yeux, elle est tout ce qui compte et qui me fait avancer chaque jour coup après coup !

– Si tu crois que la haine sera toujours ton moteur, c’est que tu n’es pas la machine que tu crois…

– Je ne crois pas. Je ne crois plus. Je collectionne les cicatrices et je prends du bide, c’est tout. Et puis joue au lieu de parler, pendant ce temps j’éviterai de penser…»

Enfant j’avais un ami imaginaire, depuis cette nuit-là il ne me reste que la folie.

*Sujet d’élite

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« Mercredi, 1er Aout 2001, 23 heures et quelques grammes dans le sang, terrain de basket-ball derrière la Part-Dieu, fin d’une partie qui n’a jamais commencé, pause 8.6. avec expédition punitive »

I Love This Game.

Le jeu de la mort sans aucune danse, juste une bouteille dans une main, le ballon dans l’autre et un terrain toujours trop grand pour entreprendre une quelconque tentative de shoot en extension en direction d’un panier marchant à reculons. À ce niveau là on n’essaie plus, on s’acharne. Mais l’alcool donne plus de courage que de lucidité.

Et par l’une de ces nuits d’août dispensant autant d’insomnie passagère que d’angoisse sociale, le mauvais génie vint me chercher en bas de ma tour à l’heure fatidique de l’infusion. Ce timing séparant les hommes par l’horizontale ou la verticale. Nous empruntions une route à l’abandon en rodant dans les ruelles du centre-ville — éventré de ses gens — au volant de la délinquance assistée à coup de 16 mesures assassins en 44100 Hz, s’il vous plaît.

Après notre halte de prédilection sur le playground de pèlerinage, deux choix s’offraient à nous : rentrer mourir — un peu mais pas trop — contre un matelas ne répondant jamais à nos dilemmes de soiffards ou combattre le code pénal et le système solaire en fonçant tête baissée dans la nuit nègre sans cause précise. Et peu importe s’il n’y aurait plus de soleil à voir en bout de piste. Nul ne se souviendra de nous, alors pourquoi faire semblant encore cinquante ans ? La romance n’avait pas sa place dans notre dramaturgie, nous ne vivions aucune bohème, juste la galère la plus crasse.

Le mauvais génie se leva d’un coup d’un seul, malgré la gravité et la fermentation, pour se dresser au-dessus de ma tête au bord de l’implosion et m’intimer l’ordre de ramasser ce qu’il me restait d’humanité et d’aplomb pour me mettre à la place du mort et entamer une séance de karaoké à m’en faire rompre les cordes vocales. Merde les punks envieraient presque notre passion pour l’autodestruction ! Les crissements de pneus et l’abus de basses agissaient comme des marionnettistes sur ma nuque, alors…

Et si, en dépit de ce projet de société sans avenir, j’avais l’idée saugrenue de refuser l’offrande, mon jumeau démoniaque m’aurait chuchoté doucement, lentement et méthodiquement en s’approchant de mon visage décomposé :

« – Pourquoi enfoiré, hein !? Dis moi pourquoi tu refuserais de m’accompagner sur le chemin de l’enfer ?

– Disons que primo là tout de suite, lui dirais-je, j’ai une bouteille à la place du libre arbitre, secondo l’enfer est une conception un peu trop carcérale pour être divine et tertio tu sais que je t’aime, mais ton haleine de pilier de comptoir par pitié, ailleurs… Parler avec ton cul ne te réussit guère !

– Ha comme ça on fait la fine bouche, on joue sa mijaurée, on fait sa coquette espèce de biatch ! Quand tu avais bu cette bouteille de rhum La Mauny cul sec, tu devisais un peu moins Monsieur «j’ai des états d’âme», Monsieur «j’ai une conscience», Monsieur «j’ai un avis», Monsieur «j’ai laissé mes couilles dans la bouche de quelqu’un d’autre» !!!

– Hein, quoi ? Mais t’es un grand malade toi, lui aurais-je asséné. Le goût du danger, c’est une chose, mais si on ne le met pas en perspective avec l’avenir, quel est son intérêt ? Hein, monsieur «je parle plus vite que je ne bois» ! Perdre l’usage de mes tympans ok, mais pas de mes tempes ! Je veux bien stagner en ta compagnie, mais l’état végétatif très peu pour moi !

– Hum t’as peur de quoi soldat ? Hein, dis moi !! De rater la vie que tu n’auras jamais hors du quartier, tu tournes le dos à la mort, hein ?

– Non, je ne la crains pas, ma gueule, et à tord ! Mais j’ai peur du souvenir… Et tu devrais aussi…»

Le silence qui aurait suivi aurait bien valu un enterrement.

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« Jeudi, 19 Juillet 2001, 21 heures et des poussières, terrain de basket-ball derrière la Part-Dieu, fin d’une partie virile mais correcte, pause H2O et moments de vérité »

Les mains sur les hanches, le visage plus que constipé et les respirations sous assistance, je laissais à mon seul corps la responsabilité de ses actes. Je suis pilote, pas mécanicien. Putain j’avais le poumon gauche calciné, le droit avait perdu sa rustine durant la bataille et je n’avais plus de force pour les cracher, les mains et les genoux encastrés dans le granit. Hum, j’aurais pu comme tout le monde avoir des problèmes de santé, mais je possédais plutôt une forte addiction à la junk food. Moralité le kebab est plus mortel que la cigarette.

Le ciel Rhône Poulenc de la cuvette lyonnaise finissait par se draper progressivement d’un bleu cartouche. Et durant ce point de bascule entre la dispersion des effectifs retrouvant leurs rombières et les réverbères touchés simultanément par l’illumination, il ne restait guère que le mauvais génie et mon sac à dos pour écouter d’une oreille distante mes interminables digressions. Et oui, il n’y a qu’un ami pour faire semblant, les autres vous ignorent tout bonnement !

Nous devisions le sourire en coin sur le grabuge qu’avait provoqué Loft Story chez les sociologues en goguette, tout y en voyant un signe de la fin du monde en prime time dans ce tas d’immondices logé dans la bouche de tous les Français. La gourmandise est un vilain défaut et un sacré défi.

Nous allions atteindre le paroxysme de notre débat en évoquant la partie de l’émission portant sur les néologismes lorsque nous fûmes interrompus par une saillie familière. Le genre de voix qui vous prend deux à trois heures de votre vie que vous ne retrouverez jamais, le pire c’est que durant cette séance, nous n’avions que peu droit au chapitre. Et oui nous n’avions que 21 ans, c’était déjà pas mal vu notre pédigrée mais pas suffisamment pour lui.

Et tout droit sorti de la pénombre – en provenance directe dont ne sait où – nous vîmes apparaître le svelte et retord renard des faubourgs. Le genre de spécimen préférant les questions rhétoriques aux réponses toutes faites. Le type d’énergumène opinant du sous-chef avec un large sourire comme pour indiquer à tous les contrevenants que leur part du dialogue n’est qu’un ultime moment de répit dans son monologue à deux places. Attachez vos ceintures. Le pas aérien, le corps miraculeusement en équilibre, ses longs doigts frémissaient de préliminaires et de programmation neurolinguistique. Il s’approcha alors à portée de débat, puis sans même nous serrer la main, il entama les hostilités :

« – Alors les jeunes, on fait dans la moralité républicaine au lieu de parler de contrôle social ?

– Heu non, nous parlons de Loft Story !

– Ha bah non, mon duo décadent préféré, réfléchissez ce n’est pas une question de télévision ou de programme, l’enjeu c’est le gardiennage démocratique !

– Ouais ouais, je vais vous laisser discuter le négro et toi. Les histoires avec des mots à 7 syllabes, très peu pour moi et puis il fait soif ! Allez, à la revoyure, le mauvais génie prit la tangente aussi vite qu’après l’un de ses adultères par omission.

– Puisqu’il ne reste que nous deux mon cher Sylvain, revoyons ensemble ta grille de lecture. Pourquoi diable d’échines-tu contre Loft Story ? Tu as du temps à perdre ?

– Heu et bien, disons que c’est une fidèle photographie de l’époque et du pays. Et, en outre, ce n’est pas un problème de cliché, mais de sujet, je trouve cela très dérangeant de vivre en pleine cour des miracles ! Ce n’est pas la société du spectacle, mais celle de la débâcle !

– On est encore naïf à ce que j’entends, tu croyais habiter le pays du siècle des Lumières, des Droits de l’Homme et de la culture soluble dans la masse ? Comme, c’est mignon…

– Non bien sûr, je sais bien que c’est une publicité mensongère à l’usage de l’Office du Tourisme, mais tout de même, un peu de tenue. Je veux bien être ouvert d’esprit, mais pas dilaté…

– Tu sais quoi, finalement Loft Story, jeune homme, c’est la concrétisation par le bas de tout ce que tu veux. Ce pays t’emmerde prodigieusement, sa culture séculaire ne veut pas de toi, et toute ta vie est déterminée par le droit du sang et le poids du fric qui en découle. Le Loft, c’est l’Amérique, sub-culture du pauvre, mœurs transgressives, religion des self made men et communauté des idées à la carte. Tu croyais que la destruction des frontières par l’argent apporterait l’émancipation ? À moyen vulgaire, public vulgaire, et peu importe le système, une industrie reste une industrie…

– Mouais, mouais, mouais, pour moi le problème n’est pas économique mais social…

– Tu vois, tu y viens de toi-même, le contrôle social ! Tu devrais arrêter Sun Tzu, tu n’es pas en guerre que je sache, nous sommes dans le pays de la contestation molle. Tiens essaye ce truc là, ça sera un meilleur pied de biche pour toi.

– Hum, Le Pouvoir sur Scène de Georges Balandier, hum… Concrètement, il faut que je fasse quoi avec ? Que j’assomme mon prochain avec ce pavé ou que je le lise ?

– À toi de voir mon frère, à toi de me le dire… »

La discussion continua de plus belle en partant de la dualité de Darwich à la cartographie génétique de notre espèce en passant par les détails du concert de Gravdiggaz qu’il avait organisé au Transbordeur en 1997. C’est à ce moment que j’ai arrêté d’écouter bêtement pour entendre patiemment !

Je crois que c’est ce que j’affectionnais le plus dans nos conversations à bout portant, le fait d’aller n’importe où en partant de nulle part. Sans slogan ni bannière et encore moins de camp. Mais l’idée était là précisément, il n’avait rien à vendre et je n’avais rien pour l’acheter.

Malgré son petit ton professoral et sa petite dizaine d’années de plus, je me languissais des tournures parfois institutionnelles de sa versification. Parce que lui au moins avait le vécu nécessaire pour porter le savoir de salle de classe sur ses épaules. Il ne faisait pas la leçon au-dessus des autres, il ne dealait pas des échantillons de pensées sans en avoir en stock, il mettait juste sa connaissance en jeu à chaque fois qu’il ouvrait la bouche. Depuis, j’ai toujours cultivé à juste titre une certaine défiance légitime vis-à-vis des gens trop polis – un ulcère au lieu de l’âme – se promenant avec leurs diplômes autour du cou et possédant une bibliothèque à la place de la tête !

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« Samedi, 14 juillet 2001, 18h30, terrain de basket-ball derrière la Part-Dieu, fin d’une partie endiablée, pause H2O et Girl Talk »

Butor qui avait plus de mâchoire que de tête cria à trente centimètres des oreilles du mauvais génie :

« – Et sinon, ça fait quoi ce soir ? 14 juillet, O-BLI-GÉ,  je vais aller en résoi et serrer une michtonneuse ou deux, une de celles des Monts d’Or O-BLI-GÉ !!!! Yes papa !

– Subtile, vraiment subtile, mais ma bite à couper que tu vas serrer ta main droite comme tous les soirs !

– Hein hein, hein hein, éructe Butor !!!!

– Hum je vois que monsieur est très fort en onomatopées et sinon le français tu as déjà essayé ? Ils le parlent pas sur ton île ?

– T’sais quoi, t’parles beaucoup, mais t’fais jamais rien j’en suis sûr pélo !!!!

– En tout cas ce n’est pas ce que m’a dit ta mère. »

Heureusement qu’à ce moment crucial de la narration s’acheminant vers du free fight, une charmante mais néanmoins putassière jeune fille se mit à parler du cul du haut de ses talons compensés, sous la noble égide du bref morceau de tissu qui lui servait de mini-jupe. Et d’un coup de bassin, un seul, elle lobotomisa les deux belligérants jusqu’à la venue de sa future consœur. Le string ficelle est l’avenir de l’homme à ne pas en douter !

Personnellement, j’avais décidé depuis le début de l’après-midi de ne pas prendre partie, car la causerie avait dégénéré dès la première minute de jeu entre les deux coéquipiers. Et puis d’arbitre à bouc émissaire, il n’y avait qu’un pas – voire deux pour martyr.

D’un côté il y avait le mauvais génie, qui lui était le seul à me supporter 24h sur 24h et qui, de plus, avait les clefs de la voiture, quant à ma droite, recouvrant une large partie du soleil, il y avait le panoramique et subtil Butor. Je vous laisse imaginer d’où lui vient ce charmant sobriquet.

Admirez plutôt le bébé. Un monstre de poche, 2m10 de muscles animaliers nourris à la cuisine antillaise et 100 kilos de bêtise cathodique érigeant la violence à l’état de religion, équipé d’un sens moral douteux flirtant avec la lâcheté la plus ordinaire. Sa vie se résumait à rejouer encore et encore la scène de la rivière dans «La guerre du feu».

Le patibulaire et pathologiquement atteint Butor amusait particulièrement le mauvais génie qui rêvait d’en découdre du haut de ses 1m65 – enfin, sur la pointe des pieds – et de ses 60 kilos avec l’artillerie de poing, mais avec le petit Sun Tzu illustré à la place de l’instinct de survie. Je voyais inquiet ses yeux étinceler à l’idée David et Goliathienne de briser à la base le genou le plus faible de son vis-à-vis afin de le positionner à hauteur de sentence pour administrer avec amour une série de low kick dans la tempe, dans un moment d’allégresse onirique que n’aurait pas renié la Calas. La poésie des coups et blessures…

Ah, ces moments de testostérone appliqués sont dévolus à la camaraderie au final ! La cultiver, la chérir, la protéger, qui plus est si celle-ci peut être éprouvée contre un ennemi commun, n’importe lequel, n’importe quand, n’importe comment et pour n’importe quoi ! La bête humaine dans tout son génie universel, car jouer à la mort, c’est toujours plus distrayant à plusieurs. Et puis de nos jours la qualité d’un spectacle tient plus du public que de ses acteurs. Voilà pourquoi il ne s’est rien passé. A bien regarder autour de nous, le playground était désespérément vide de tous témoins pour perpétrer une quelconque légende urbaine. Alors les mines crispées des deux combattants se sont détendues jusqu’à la traditionnelle poignée de main, soldant les comptes jusqu’à la prochaine fois.

J’étais autant hébété que circonspect devant ce moment d’humanité volé à une éventuelle rubrique nécrologique. Et lorsque dans le soleil couchant, je vis le petit con et le grand abruti rire aux éclats, épaule contre épaule, enfin épaule contre coude, je ne pouvais m’empêcher de penser qu’un string ficelle sur un cul cambré était la seule alternative à notre barbarie toujours plus propre et sophistiquée.

Mais en attendant l’éveil des consciences et l’ajout à la constitution de l’orgie comme un droit et un devoir fondamental, la seule guerre acceptée de tous se déclare avec un sifflet, des maillots et un ballon. L’honneur est sauf, tout n’est pas perdu, heureusement qu’il reste les hymnes pour nous remémorer le goût du sang.

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Comment dire… Ma bienséance est gouvernée par ma panse. Et elle m’impose de répondre par l’affirmative à chaque invitation dînatoire, sans exception aucune, même avec des extrémistes. Au regard du mépris séculaire de mon boucher, je ne peux que me joindre à la table des barbares présumés.

Ma gourmandise ne fait pas dans la politique et encore moins dans la théologie, mais j’avoue cultiver une méfiance certaine à l’égard des barbus, a fortiori cuisiniers. Ce n’est pas que je craigne un moutonicide imaginaire à même la baignoire, mais les poils fourchus dans mon assiette très peu pour moi ! Malgré tout, j’allais tromper mon impérialiste restaurant américain pour des mets terroristes.

 

Ce soir à Vénissieux la communiste, au 13ᵉ étage de cette tour plus bancale que vétuste, avec ascenseurs et fragrance d’urines les jours de chance, nous célébrions le départ de mon meilleur ennemi. Oui, mon meilleur ennemi. Mais ne vous méprenez pas, il ressemblait en tous points à la définition la plus fidèle que j’ai de la famille. Ceci étant nous étions les exacts opposés. Tout nous séparait et pourtant nous ne pouvions pas rester loin de l’autre trop longtemps.

Nous voulions toujours avoir tous deux raison mais pas pour les mêmes tords. Il avait tout d’un écorché vif et moi, sans le savoir, le parfait tranchant de la lame. J’en veux pour preuve nos sujets de discorde favoris, la nature illimitée de mes sarcasmes face à son respect quasi divin pour la figure maternelle. Celle-ci étant souvent associée à mes élucubrations fortement imagées en fin de phrase, il n’en fallait pas plus déclencher une guerre de tranchée dans le périmètre de sa chambre!

Parfois lorsque l’esclandre et la punchline se faisaient trop cinglantes, mon meilleur ennemi, un homme un tantinet sanguin s’enquérait d’un couteau à large larme et me poursuivait dans la cage d’escalier du treizième étage au rez-de-chaussée. Une fois dans le hall d’entrée, je bondissais derrière un muret et de là, je trouvais une position stratégique pour continuer mon allocution à couvert. À cette époque, la conversation se terminait sur une analogie entre mon avenir et l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila. Toutes les guerres ayant leur trêve et tous les couples leur logique, je finissais par aller acheter une bouteille de Fanta citron et je faisais amende honorable. Enfin, au moins jusqu’à la prochaine crise œdipienne !

Mais revenons plutôt au dîner théologique. Pour l’occasion, le colocataire de circonstance de mon meilleur ennemi et ses collègues de la prière du vendredi avaient concocté des grillades, des légumes vapeur, du thé à la menthe et quelques pâtisseries pour m’achever. C’était un fondamentaliste moderne, le colocataire de circonstance de mon meilleur ennemi, le genre avec la dernière paire de Air Max, la Playstation, l’album « La racaille sort un disque » de NAP et un DESS en communication, un pur produit d’époque vous dis-je. Sa vitrine modérée ne m’empêchait pourtant pas de l’éviter comme la peste. Point trop d’urbanité n’en faut !

À chaque fois que nous tombions nez-à-nez dans leur minuscule appartement, il tentait systématiquement de me donner la bonne parole avec une conversion à la clé. Je ne pouvais pas lui en vouloir, il était en confiance. Le maire de Vénissieux laissait le fameux Imam gambader dans toute la ville, le plus tranquillement du monde, même devant l’arrêt du bus 48 Express, là où lui et son équipe tenaient la jambe et le crachoir du pauvre malheureux qui n’avait pas son crucifix sur lui. Et pour cause, le noir et la conversion à l’islam, c’est comme les blondes et la conversion à la négrophilie.

Le fameux colocataire de mon meilleur ennemi tenta ce soir là, une énième fois, de me faire adhérer au club en flattant mon surmoi. Mais j’avais un os occipital déficient, les informations avaient du mal à arriver jusqu’à mon égo. Sans compter qu’entre manger et penser il faut choisir et mon camp était tout désigné : je ne crois qu’en ce que je digère. D’ailleurs si j’avais pris ma retraite du milieu en quittant l’équipe de Jésus, ce n’était sûrement pas pour en intégrer une autre. De toute manière, je ne suis déjà pas d’accord avec moi-même, alors avec un Dieu hypothétique…

Mon ennemi et moi étions un couple dysfonctionnel soit. Mais pire, nous n’étions que les deux tiers d’un ménage à trois. Durant ce repas d’adieu, il manquait ce dernier tiers, le mauvais génie de mon meilleur ennemi celui qui faisait le lien parfait entre l’écorché vif et la lame. Ce bon monsieur avait décliné l’invitation. Officiellement pour une obscure histoire de concours « La meilleure crocheteuse de braguette du monde, du soir ». Officieusement d’après lui, Dieu ce sont ceux qui en parlent le moins qui le pratique le mieux. Puis le mauvais génie étant le plus sentimental de nous trois, Ô comme il lui était dur de dire au revoir.

 

Mais nous trois, nous avions une modeste religion où nous étions en communion, où nous ne parlions pas un ballon à la main sur un morceau de playground municipal. Un paradis gratuit et sans engagements. Dorénavant, à 30° à l’ombre, nous serions un de moins sur le terrain de basket. Nous serions un de moins tout court.

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«Et plus que du sens, il me fallait dorénavant un but pour ne pas sombrer dans l’oubli ou la rubrique nécrologique…»

Toujours pas de ravalement de façade à l’horizon et l’an 1994 est arrivé, un chronomètre à la main pour me stipuler amicalement mais fermement que c’était cette année ou jamais, au quel cas une brillante carrière de CEO de friteuse dans un fast food m’était toute destinée. J’ai haussé les épaules par habitude en soufflant tout ce que je pouvais, avant de regarder dans le vide en attendant une réponse.
Et sans que je ne m’en rende compte les Rwandais débattaient déjà entre eux de l’épineuse question de l’identité nationale, Kurt Cobain goûtait au feu sacré, Robert Hue donnait ses lettres de noblesse au collier de barbe, Charles Bukowski prenait son ultime biture et les racailles élevées par Lacoste dansaient péniblement nuit et jour le Mia sous ma fenêtre.
Nous étions vraisemblablement en juin lorsque la machine à éphéméride s’est arrêtée pour le grand je m’en foutisme estival et j’avais fortement sollicité mon foi au lieu de ma cervelle.

Concernant ma fibre scolaire, j’avais en moi un tel amour pour la classe de cinquième qu’il m’était tout bonnement impossible de la quitter. Nous nous donnions donc à nouveau rendez-vous en septembre en espérant que les professeurs que j’avais éduqués aient enfin retenu mes enseignements ! Mine de rien je commençais à organiser quelque chose, un sabotage peut-être, mais quelque chose de construit.
Début du tour de France, certains retournent au bled d’où qu’ils soient, même du Morbihan. Quant à nous autres, il nous restait les allers et retours poisseux dans les transports en commun, la vente de fleurs (prises dans les poubelles de la clinique) à l’entrée du cimetière et notre participation à l’explosion démographique de la piscine municipale – si Jésus avait traîné avec nous, lui aussi aurait tenté un aquaplaning en dépit de l’apesanteur et des baigneurs !

Toujours aucun plan A à l’horizon et encore moins de plan B.
Les antennes paraboliques lorgnaient vers leur satellite et moi en direction du goudron qui semblait ramollir sous mes pas sans vraiment me retenir, la moiteur de l’atmosphère n’avait rien de sensuelle et j’en étais déjà à mon 12e Mr Freeze. Pas d’évasion possible, emprisonné sur Terre, parqué dans mon quartier.
Sans leur permission de sortie, économique ou généalogique, les fous tournaient en rond entre les contrôles de police à l’heure du goûter, la philosophie en nocturne et les érections matinales. La chaleur ne faisait pas de prisonniers et les toxicomanes désertaient progressivement le jardin d’enfants, disparition des seringues faisant foi !
De 11h à 23 h, pour limiter la propagation du coma ensoleillé, les plus chômeurs des consommateurs exhibaient leurs hauts parleurs confondant volume et puissance pour se battre en duel de cloison en cloison, de balcon en balcon et de tour en tour. Mais avec les mêmes artistes, les mêmes playlists, le même titre : nous étions plus proches de la  pensée unique que du métissage de paillasson…

Ainsi, à l’heure où les platines laser s’installaient confortablement dans les foyers grâce au CD 2 titres, l’underground était encore une maladie imaginaire. Et à l’époque, même en plein été et en province, «L’agitateur de curiosité» rue de la République rechignait à importer les ogives américaines du moment, d’habitude négligemment entassées dans un bac dénommé colonialement black musique. Devant ce lieu de culte et d’espoir, les plus déviants et marginaux des clients passaient de l’électro à la world, de la new jack au triphop, de la house au HIP HOP*, d’un cd à un autre, puis d’une rangée à une autre. Ceci avait pour effet de produire des rencontres au sommet, aussi inattendues que fructueuses. Les victimes et les bourreaux réunis fraternellement sur l’autel de la culture de masse. Mais une fois les juilletistes en piste pour l’A7, le manque de Bpm se faisait ressentir cruellement et les plus faibles se laissaient conquérir par l’éternel tube de l’été, une fois la fête nationale passée…

Sur mon banc de prédilection, concassé à l’horizontale entre un RMIste et un récidiviste cherchant la verticale, j’ai eu une épiphanie après ma seconde 8.6. ! Puis je l’ai perdue et enfin retrouvée aux alentours de mon second round de déglutissement en public et en stéréo, s’il vous plaît ! J’allais donc donner au peuple ce que la FNAC lui refusait ardemment : une semaine de décalage horaire sur le reste du monde et une classification musicologique.
Devant l’étendue de la tâche qui allait être la mienne j’ai repris une bière pour m’éclaircir les idées pendant que le ciel commençait à s’écraser lentement mais sûrement sur mes paupières juvéniles. Le sommeil du juste vaut bien toutes les vengeances nocturnes.
Le matin suivant à 7h00, surpris par l’horaire et armé d’un stylo fuyant, d’un cahier usagé et de Nesquik dégriffé, j’ai échafaudé malgré moi en quelques colonnes et quelques chiffres, un business plan et un début de carrière.
Après un blackout bien mérité, ma studieuse après-midi fut consacrée au négoce avec mes fournisseurs de supports magnétiques, sans oublier l’obtention d’une carte de membre auprès de mon diffuseur officiel, la médiathèque. Celle-ci possédait une réactivité à écœurer les disquaires plus fonctionnaires que musiciens.
Le temps de gober deux aspirines et des Dragibus, habillé comme un dimanche à la messe, j’entamais timidement mon étude de marché, en prospectant auprès des arrêts de bus bondés emmenant ma clientèle supposée vers ses zones criminogènes ou pavillonnaires.

La demande était bien au rendez-vous et l’argent de poche allait couler à flot.

Le reste de ma semaine fut consacrée à l’histoire contemporaine de la musique au fin fond de la bibliothèque, à l’emprunt à long terme de quelques magazines chez le buraliste, puis à la collecte de fournitures de bureau glanées auprès des Hospices Civils de Lyon.

Ma petite entreprise illégale était née : je compilais, copiais, listais et dessinais des mixtapes en série limitée ou personnalisée pour 50F. La chaîne-hifi en est morte, mais c’était pour la bonne cause…
Mon bureau à ciel ouvert était sur le 3e banc à gauche de la cage d’escalier du bâtiment 35, de 10 h à 19h et en nocturne en fin de semaine. Les contrevenants testant l’interphone après 22 h étaient irrémédiablement alpagués par ma logeuse et en créole qui plus est !
Lorsque la concurrence s’organisa en se spécialisant dans le Funk et le Rap Français, j’ai décidé d’aller voir ce qu’il se passait après le périphérique.
Je partais donc aux aurores faire le tour de la proche campagne les samedis et dimanches sur les marchés, ce qui me permettait de voyager en bus, de voir des gens et des décors, un morceau de la France d’à côté en somme!  Au final, je ne suis pas devenu riche, loin de là, mais j’ai pu assouvir ma passion et la communiquer à mon prochain moyennant finance. La philanthropie beaucoup en parlent, mais peu la pratiquent.
Last night a mixtape save my life !

À 14 ans, en plein été, j’ai appris à mes dépens que la rectitude était la seule folie raisonnable…

* HIP HOP en majuscules parce que KRS ONE le «Teacher» me l’a vociféré à portée de postillons à l’Ecole Normale Supérieure lors d’une conférence sur les cultures urbaines en 2005.

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Note de service : Je n’ai pas appris la discipline à l’armée, ni avec Françoise Dolto – Part 1/2 http://wp.me/pn1lw-1xH

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