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Archive for the ‘Teaser en série’ Category

Début de transmission.

Heureusement que tu étais là pour m’offrir une caisse de résonance.
Cher journal de bord, Cher moi.
Puisque j’écoute parler ma voix intérieure et que je n’ai aucun problème d’égo, perdu que je suis entre le vide intersidéral et le néant de mes semblables, je peux affirmer le plus tranquillement du monde que la folie me guette ou me veille, c’est selon ! L’espace, tout le monde en rêve les yeux rivés vers la chape de plomb d’ozone, mais une fois sur place – chers partisans de la tête dans les étoiles – l’expérience ressemble à s’y méprendre à des vacances forcées chez une tante éloignée. Dans ce cas de figure, deux options s’offrent à vous, soit vous émerveiller avec la béatitude d’un humanitaire devant le moindre caillou soit compter le temps qui passe jusqu’à ce que ce celui-ci ne commence à vous interpeller par des questions sans réponses.

Personnellement, la lune, je n’ai jamais voulu la décrocher pour qui que ce soit et je n’en ai pas fait un objectif. Mais comment me suis-je retrouvé candidat à cette partie de cache-cache en solitaire ? Et bien, disons que j’avais tout et à force de remplir les cases une par une dans le bon ordre, je me suis retrouvé sans rien, l’expression tout donner m’avait offert tout son sens et s’en était trop. Je ne suis qu’un homme – même en couple – j’ai le nomadisme qui me démange et le tuning affectif qui ponctionne mon énergie vitale. Il fallait à tout prix que je sorte les poubelles, que j’aille acheter un paquet de cigarettes pour ne plus revenir, alors j’ai opté pour le compromis en acceptant un travail à l’étranger. Vous savez, le genre d’étranger où il n’y a plus de frontières…

Je suis le concierge du petit pas pour l’homme et du bond de géant pour l’humanité, et ça me fait une belle jambe. En translation avec le soleil. Encore un jour pour rallier l’année suivante, encore un jour afin d’attendre le mois prochain. Je voudrais bien pointer et faire la grève, mais je n’ai nulle part où aller et personne auprès de qui me plaindre, franchement. À quelques encablures de la galaxie limitrophe. Encore un jour pour s’assurer que l’heure s’écoule, encore un jour afin de savourer la minute ultime, encore un jour jusqu’à la dernière seconde. En orbite autour de la Terre.

Je tourne en rond, mais pour de vrai, sans discontinu, et mieux vaut ne pas compter sur la révolution et les jours fériés, d’ailleurs Dieu n’a toujours pas donné signe de vie.

Et m’y voilà enfin, presque au bout de moi-même, plus ou moins sur mes deux jambes, passablement électrisé et suffisamment déçu pour me fabriquer du passé. Lorsque tout devient familier, il est probable que l’on perde toute son intimité, que l’on devienne honnête et nu n’ayant personne à qui mentir. Comment allais-je survivre aux regards des autres, les mythomanes habillés de la tête aux pieds? Et puis, je devrais composer avec le goût des autres et cela m’effraie au plus haut point, il me faudrait tolérer une autre médiocrité que la mienne. Etre poli, ne pas répondre, traverser en temps et en heure, mourir en silence, etc.
Home sweet home. Sachant que le foyer demeure l’endroit où l’on est et non celui dont on peut se souvenir, il y a fort à parier que je laisse un peu de mon histoire sur le pas de ce huis clos. Je vais devoir le regretter pour enfin l’aimer comme il le mérite. Mon insignifiant morceau de vie combattant l’apesanteur au milieu de nulle part.

Je ne sais décidément pas si je rentre chez moi ou si j’arrive quelque part. Je suis un sans astre fixe, l’univers est ma patrie, et moi j’ai le droit et le devoir d’employer l’universalisme. Puisque la distance redéfinit à loisir l’espace et les identités qu’il abrite, je peux me permettre de parler du futur de notre amour au passé, non ?
Mais je m’éloigne habilement du sujet. Ai-je l’image ou le fantasme de ces «quelqu’un» me promettant adrénaline et massage cardiaque à mon retour? Il y a si longtemps que je les ai quittés pour des raisons révolues que je ne sais pas qui, entre eux et moi, est la parenthèse de l’autre. Si je veux être honnête un instant encore, piégé dans mon mausolée électronique, le but avoué était de tenir et pas de revenir. Il y avait plus d’espoir dans la repentance éventuelle que dans la seconde chance résiduelle.

Les messages épisodiques que nous échangions par alternance étaient faits d’une politesse de circonstance qui meublait et parfois entretenait la monogamie, ou plutôt son fantôme. Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Il va nous falloir vivre ensemble.
Evidement, les enfants sont là pour faire tampon, mais même eux ont déjà une fuite programmée. Passer du spectacle de la séparation aux basses besognes avec sa liste de course, cela a de quoi propager le doute dans la psyché du commun des toxicomanes. Rien de mieux qu’une relation à distance. Au final, ce qu’il y a de meilleur dans la solitude et dans l’Amour, c’est l’attente souvent, l’absence parfois.

Dans l’espace personne ne m’entendait crier, mais moi je t’entends déjà d’ici…

Cher journal de bord, Cher moi.

Tu vas me manquer, comme la vérité.

Fin de transmission.

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Puisque le cœur m’en disait, j’aurais voulu en perdre ma tête, mais j’y ai laissé le reste…

Tout est une histoire d’attente d’une vie, de passantes inconnues et de terminus plus ou moins définitif. Voilà, nous sommes arrivés à destination, tout le monde descend, enfin moi, pour sûr. Parfois au hasard des caprices de la circulation, c’est en rentrant chez soi que l’on perd son chemin en croyant fermement que rencontrer un platane vaut mieux qu’accepter la fatalité. À vrai dire, je ne sais plus comment tout est arrivé, le moment où le temps a cessé d’être un compagnon fidèle pour devenir un témoin à charge entre anomalies et destinées. Techniquement, j’aurais dû être à l’abri de tout cela, question d’éducation, de programmation, mais la timidité la plus flagrante a des montées de bonheur incontrôlées. Alors j’ai quitté la route pour ne plus la retrouver. Ma vie suivait scrupuleusement les desseins du papier millimétré imprimé dans ma tête et mon regard avait plus tendance à s’excuser en fixant le sol qu’à soupirer en défiant le ciel. Mon hymne à la joie au son de la pointeuse, mon régime élémentaire plus rigide que psycho, aucune entorse à la règle, pas de fantaisies sentimentales, rien d’extraordinairement particulier, tout de la routine parfaite. Puis tu m’as rattrapé au vol sur la route du déjà-vu.

Plus les jours passaient à loisir sur notre insouciance de porcelaine, plus je prétendais parler au pluriel. Depuis elle, je ne suis plus tout à fait moi et c’est bien ça le problème et la solution. Pour moi l’Amour est une forme de don de soi jusqu’à la dernière pièce, tandis que pour elle, il est un suicide à rebours, à deux si possible et plus si infidélités. Nous le savions dès le départ, mais sur une erreur de jugement en secourant l’image que l’on a du désir, on peut croire que l’on a l’âme d’un sauveur et cela suffit à tous les sacrifices, même les plus idiots. Pour tout dire, j’avais tout du réparateur et peu de points communs avec l’âme sœur, mais en partant de rien, on peut se satisfaire de pas grand chose. Et une habitude en provoquant une autre à chacune de ses disparitions punitives, je savais d’orès et déjà dans mon fort intérieur qu’une nouvelle part de moi allait devenir sienne et c’est bien ce que ce que je recherchais après tout, pour être honnête.

De rendez-vous manqués en attente téléphonique, j’ai appris à chérir ses absences comme des sursis nous séparant du drame suivant. Pourquoi invoquer les maladresses des accidents aléatoires lorsqu’on a le talent du sabotage sur sa propre personne ? Certains aiment jouer à la mort pour être sûr de lui survivre au moment opportun. Le seul inconvénient avec les récidivistes et leurs tentatives, ce sont les dégâts collatéraux à même le domicile et leurs prisonniers de guerre atteints du syndrome de Stockholm. Je crois que j’aime le feu autant qu’elle, ils sont indissociables et donnent un goût de paradis à l’autodestruction. Mais dans le jeu de la surenchère passionnelle, il vient un moment où l’on n’a plus rien à donner, et donc fort logiquement, bientôt à coup sûr, un jour sûrement, demain peut-être, je ne lui servirai plus à rien. L’Amour est une parenthèse raisonnable pour l’instinct de survie.

Puisque le cœur m’en disait, j’aurais voulu en perdre mon âme, mais j’y ai laissé le reste…

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Ma vie préfabriquée, grise, lente, raillée est intégralement cernée par une émission de télévision qui s’intitulerait les Maçons du cul où nul ne pourrait échapper au devis de l’entrepreneur. Comme cela va de soi, l’argent forcement sale et la violence notamment criminogène en sont ses dépendances. Avec un compte en banque dépressif et une masse musculaire à même les os, voilà mes options. Un programme de haute tenue oscillant entre la philanthropie hypothétique et la proctologie expiatrice, et vous êtes priés de dire merci en sortant. À force de voir en boucle l’industrie monde comme une immense succession de collusions, de collisions, de chair en fusion, désabusée et hypnotisée, je ne vois plus de gens, plus de genres, tout est mixte, puis asexué ! Rideau. Encastré dans mon lit une fois la nuit effondrée, je pourrais prendre mon pied mais je lui préfère ma tête, sans la garantie que cela serve vraiment à quelque chose ou à quelqu’un d’autre…

Dans mes jours sans coma, ni cauchemars, j’arrive à respirer sans m’étouffer à la vue des barbelés encerclant mon jardin d’enfant et lorsque pris d’un espoir panique je ne fonce pas contre les murs, ce sont eux qui me percutent de toutes mes tentatives avortées. Totalement sonné et quelque peu résigné, je retourne sur mes pas – qui m’attendaient sagement – trouver une occupation moins dangereuse que ma propre soif de liberté. Pour passer le temps, les honnêtes gens gesticulent en aboyant au reste de la création le bilan comptable de leur générosité – exonéré d’impôt ou de purgatoire – moi je préfère ma culpabilité où je trouve mes motifs plus justes, ceux-ci passeront les caprices des modes humanitaires. Arf… Certes ce n’est pas grand chose, mais je n’ai pas dans le sang le courage de la vengeance et à force passer mon chemin pour oui pour non, j’en ai perdu le goût de la marche et le sens de l’orientation.

Mais le plus naturellement du monde, le cul vissé à ma chaise, je ne peux guère que tourner sur moi-même pour trouver la bonne direction et prendre la bonne décision. Mon panorama journalier composé au minimum de téléphonie aliénante et de micro-informatique décorative complète à merveille un cortège de pin-up sur fond de tapisserie agonisante, elle-même asphyxiée par ce subtil mélange de renfermé et de nicotine où la lumière du jour s’aventure accidentellement par quelques fissures, uniquement les jours de canicule, pour indiquer au ventilateur qu’il est en panne. Cette oeuvre d’art ressemble à s’y méprendre au design de ma boîte crânienne et au démantèlement urbain en perpétuelle reconstruction. Alors, pour me plaindre et gagner du temps sur mon acte de décès, je pourrais le plus tranquillement du monde parler de prison. Soit, mais j’aime à penser que je vis des vacances pas comme les autres et que la vie est une chienne ou une main droite.

Une fois que j’en ai fini avec la minute obligatoire de plaisir personnel, le corps à l’abandon et l’esprit en suspens, presque lucide, j’arrive durant très peu de temps à me voir comme je suis, sans mon costume d’enfant trop petit pour la douleur d’un homme qui ne veut pas en être un. Que les choses soient claires, je possède plus de flashs de paumes de main s’abattant sur moi que de photographies de goûter d’anniversaire artificiel. Je fais avec, et vous ? En redescendant sur terre, je suis blafard, blême, voilà le visage qui me va le mieux, mon masque attitré sans fanatisme ni faux semblants. Soyons francs, je ne sais pas qui joue le mieux au poker menteur entre ma mémoire et moi.

Je perds souvent d’ailleurs, et dans ces occasions – privilégiées sans canapés – en reconstituant la scène du crime et la partie de puzzle, il m’arrive sur un malentendu d’inventer des univers parallèles qui dissocieraient les méthodes de la morale. Dans un autre montage de mon histoire passée, j’aurais même le pouvoir de pouvoir. Mais cet endroit intime entre mon imagination et ma mémoire ne vend que des échantillons et aucun mode d’emploi. Dans cette pièce secrète quelque part dans ma tête je côtoie des images trop parfaites pour être vraies, des issues finales qui ne m’amènent qu’à d’autres poignées de portes cachant une autre pièce et je subis malgré moi des sentiments étrangers, refoulés, oubliés. Je ne sais pas qui ils sont, peut-être des rêves, mais je réclame une trêve ou un réveil matin. J’ai peur de toutes les fins, alors je ne termine jamais rien.

Peu importe ce que me demandent, me suggèrent ou m’intiment ces voix qui veulent mon aide, prétendent à mon bonheur ou m’ordonnent comment aimer, travailler, uriner. Je n’écoute plus rien, je n’entends plus rien. On a tellement pensé à ma place que je suis pas sûr de vouloir savoir qui je suis. Et l’image que l’on a de moi finit peu à peu par me satisfaire. Elle ne veut rien et cela me va car nul ne survit à son enfance et encore moins à ses démons.

Dans ce cas qu’y puis-je du poids de mon héritage paternel ? Accepter que les autres le voient à travers moi ? Jouer le jeu en l’imitant jusqu’à l’aimer ? Le tuer une fois pour toute afin de lui échapper ? Ce ne sont pas des options, mais des culs-de-sac !

Parfois lorsque je sème provisoirement mes flashbacks, j’ai la confuse impression – incarcérée dans mon train-train quotidien – que je ne suis que de l’ADN en perdition avec un patronyme pour toute explication et consolation. Heureux que je devrais être d’avoir eu une famille, même en décomposition, et un toit miséreux avec une porte qui se refermait à l’usage sur la loi. Ne pas savoir, c’est souvent mieux que penser comprendre.

Ce qu’il y a de pire dans tout cela, c’est de ne jamais avoir connu la défaite car personne à combattre ! Alors, pour occuper mon temps libre et occulter mon tourment, je trouve des missions de sauvetage à ma mesure, des plans parfaits – enfin à peu près – qui ne réussiront jamais – à coup sûr – et ce n’est pas grave au fond, personne n’est au courant. Avec du temps et un peu d’argent, je finirais au moins par sauver la face dans ce no man’s land où chacun fait profil bas, plus bas que terre. J’aurais enfin mon but, à moi, mon signe extérieur de détresse. Secrètement je me persuade que les parois étriquées du monde qui somnolent toujours et encore, termineront leur course à mes pieds, alors enfin j’aurais gagné, par abandon, par arrêt de l’arbitre, par patience…

Et là quand il n’y aura plus de décor pour me maintenir debout, aurais-je de quoi souhaiter ma libération ? Plus de démons, plus de sauvetages, plus d’attaches, juste la vie devant moi, c’est plus effrayant que palpitant, j’en crèverais presque ! Comme tout fantasme, le meilleur moment est encore le laps de temps où on l’espère sans trop y croire et lorsqu’il arrive on est forcément déçu, il était plus beau dans ma tête, plus beau sur internet ! Ce sont les choses qui n’existent pas qui nous font avancer, ce que l’on peut saisir, on l’a déjà oublié. J’en suis précisément à un moment, dépourvu de questions et débarrassé des réponses, où je me sens renaître en laissant derrière moi les statistiques et la fatalité.

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Si vous voulez un conseil, passez votre chemin, non, en fait restez finalement et suivez à la lettre les instructions de ce kit de survie entre gens biens.

À vrai dire, je ne me rappelle plus exactement – ou je fais semblant – comment tout cela est arrivé en un instant, avant je savais où me mènerais ma destinée statistique et puis après je doutais même que cela se soit déroulé. Vous savez, les accidents, je peux les comprendre, la maladie, je peux l’admettre, mais la folie aléatoire en communauté, prononcée par un anonyme du bout de son index, je ne veux l’accepter, sous peine d’être tentée à mon tour de me taire pour toujours. Ce qu’il y a de plus effroyable dans le silence, hormis sa présence, ce sont ses premiers bruits étouffés, isolés, uniques qui persistent et résonnent tel une peur primaire des glandes salivaires et des reins qui fuient.

Lorsque la lâcheté se propage pour mieux nous guider dans le noir, certains sont tentés de refuser tout net son aide illégitime, comme si la morale qui leur servait de tuteur et la loi qui les maintenait dans le droit chemin allaient ensemble répondre à la question de la vie après la mort en offrant à la science et à la rubrique nécrologique un bouclier de chair et de sang. Depuis ma tendre enfance – comme le veut l’expression – je regarde les Hommes tomber pour des idées plus ou moins bonnes, mais ils ne se relèvent que très rarement pour corroborer leurs théories. Avoir raison, cela doit être une histoire de verticale. Je voudrais quantifier le poids sur nos épaules, puis je pourrais qualifier cette certitude qui embrase la mortalité, mais le courage été inventé pour ces moments précis, alors j’abandonne.

L’héroïsme, en voilà un mot qui force le respect, sépare les cadavres, justifie la violence et alimente le suicide en uniforme. Etrangement ce sont ceux qui lui sont totalement indifférents qui en parlent le mieux. Je préfère l’évoquer au futur plutôt que ravaler mes sanglots au présent. Finalement l’héroïsme est une croyance où chacun a sa chance, enfin certains plus que d’autres.

Le seul inconvénient avec l’héroïsme demeure sa durée limitée et la création quasi immédiate d’une autre opportunité de l’invoquer, mais l’existence est une entreprise qui ne laisse que peu de place au hasard et au libre arbitre en pourvoyant des substituts adaptés à toutes les névroses possibles et imaginables. Dieu, l’Amour ou la chance : nous vous présentons le triptyque infaillible tenant à la fois du réconfort absolu, de la promesse éternelle et de la potentialité de duperie nécessaire à tout bon travail à la chaîne. Je n’ai pas encore fait mon choix, mais je me vois mal donner mon âme ou mon cœur à qui que ce soit.

Si la détresse devient trop forte, n’hésitez pas à sonner l’alerte en entraînant le plus de personnes possible dans votre délire au caractère divin, la pitié du troupeau est à ce prix et lui n’attend que des occasions comme celles-ci pour briller de toute son humanité, de toute sa communauté. La souffrance, il n’y a pas à dire, elle est de meilleure facture que la solidarité, universelle et injugeable à la fois, une arnaque parfaite pour le service après-vente post-traumatique. Le passé de ce moment perdu me manque intimement comme s’il s’était procuré sans permission une partie de mon âme. Je l’ai vu fuir des lieux de la scène du crime en commençant par la gâchette pour continuer le long du canon encore fumant se retirant de ma boite crânienne pour enfin finir sa course effrénée contre le mur du fond fraîchement repeint.

Nier ou accepter les évènements, cela revient plus ou moins à la même chose, le point fixe de la réalité se distord fonction du nombre de croyants, de la mémoire résiduelle, du culte de la vérité en vigueur et, le plus logiquement du monde, tout et son contraire engendrent des souvenirs parcellaires et des rémissions jetables. Dans ce cas de figure, il est plus que tentant de rendre ainsi service à la communauté en laissant sa psyché à la disposition d’un professionnel des neuroleptiques pour se retrouver à l’arrivée avec plus de problèmes qu’au départ, ceci étant cela en dit beaucoup sur la santé mentale de notre liberté capitonnée. Il ne reste que mon casque d’écouteur ou la petite voix dans mon crâne pour endiguer ma perdition en pilote automatique, un sourire en devanture pour tous.

La différence entre un incident et un accident, c’est que généralement le premier se prend très souvent au sérieux et que le second s’excuse presque d’exister. Pourtant les deux interfèrent dans le trafic humain pour mieux le fluidifier, à bien y réfléchir. Dans le cas particulier d’une maladie en commun, le premier et le second conjuguent leurs efforts pour mieux cautionner le masochisme de chacune des parties et montrer du doigt un inaccessible à la portée du premier venu, faut-il encore que tous ces excès que l’on traduit par d’irrépressibles besoins, soient en réalité de vulgaires envies. Je crois que la mort anodine donne de la vie à ceux qui ne font qu’en parler, que la regarder, que la rêver à travers un fantasme sur mesure – le voisin dans son lit, l’inconnue de l’autre côté.

Pour revenir au point de rupture lorsque l’on voit les choses, puis les gens nous échapper sans que nous puissions prétendre à avoir la moindre incidence sur celles-ci, il faut revenir à la base de tout, à l’animal qui est en nous et dont la peur primale nous préserve de notre intelligence surcôtée au moment d’éviter les balles vaguement perdues. Je vois encore au ralenti les mouvements d’une échappée chaotique touchés en pleine course vers la sortie la plus proche par un projectile ne possédant pas plus de raison que son propriétaire, je sens l’atmosphère électrique et l’effroi latent dans ses respirations saccadées et hébétées, le temps qui fait une pause, les oreilles confuses et le pouls désinhibé de toutes les ordonnances. Tous les jours, je me soigne de ces images en m’emprisonnant dans d’autres.

Mais au final, même les meilleures évasions ont un terminus, car à marcher seul toujours et encore, trop souvent, on se lasse même de la liberté qu’offre la solitude. Le déni a ses limites dès lors qu’on n’a plus personne à regarder en se retournant. Ce sont les autres qui nous ramènent sur les rails bons ou mauvais puisque la folie n’est pas un moyen, mais une fin. J’aurais plus de temps qu’il ne m’en faut pour customiser ma psyché et accepter, accéder aux évidences en vente au pays du bonheur pragmatique, et voilà, nous y sommes au moment du happy end qui ferme des portes pour ne pas assumer la suite…

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Rapport XY, Dossier 08122006, déclassifié

Mes chers confrères, mes chères consœurs,

Mon propos liminaire portera sur la nature, la société et la monogamie.

Parler de l’Amour sans évoquer l’autre, en voilà une forme de solitude qui semble satisfaire la plupart des complexés du myocarde. J’imagine à mon cœur défendant qu’à partir du moment où compagnie et absence se confondent, il est impossible pour chacune des parties de contracter le moindre serment avec qui que ce soit. Disons que nous sommes en présence de l’histoire habituelle de lui et elle : lui qui ne pense qu’à prendre la tangente instinctivement et elle qui cherche à survivre puisqu’elle est détentrice de la vie. Et avec des objectifs aussi distincts qu’éloignés, comment pourraient-ils se comprendre, alors qu’ils n’ont pas su s’apprivoiser ?

Le drame évident dans tout cela, c’est que lorsque l’un des deux part pour une raison ou une autre, celui qui reste a besoin d’une vraie explication, qui plus est quand l’Amour ne peut se conjuguer qu’au passé. L’homme en a plus dans le crâne que dans le cœur, mais cela ne lui réussit guère au final, sachant que ses doutes salvateurs se transforment le plus souvent en prison idéale avec le visage de celle qu’il a quitté par l’une de ces nécessités animales. Pour ma part, j’ai horreur de courir pour courir et j’ai la même détestation pour le bonheur en forme de camisole de force, mais le problème du dilemme réside dans sa nature manichéenne. Nous avons beau étudier toutes les options envisageables, elles ne relèvent pas du caractère sacré de l’amour et de la haine.

Avant d’évoquer l’angle féminin des choses, passons en revue les démons et paradoxes des sujets mâles venus nous livrer leurs sentiments et les 1001 manières de donner du plaisir sans en connaître la définition. Entendons-nous bien, je ne juge pas, moi-même, jadis, j’ai cédé à l’appel de la forêt – depuis mon jardin en zone pavillonnaire – en convoitant ma voisine, une barre de chocolat ou même une paire de jambes sur un 4×3, mais certainement pas avec le talent et l’ambition de ces vendeurs d’amour qui n’en veulent pas. Il serait trop simple ou dans l’air du temps de définir l’homme comme lâche, mais sa passion pour les remords devrait être, elle, un moyen de reconstitution du puzzle des ruptures.

Avec du recul, je ne sais pas ce qui est le pire concernant notre analyse, à savoir le fait que certains hommes considèrent les femmes telles un objet ou que celles-ci envisagent les hommes comme un projet… Au vu de nos récentes recherches, nous en avons déduit ce que les femmes pensent vouloir avoir malgré elles, apparemment c’est de désirer le contraire de l’opposé et avoir l’opposé du contraire. Ha ! Je vois très bien vos mines déconfites, vos invectives télékinésiques et vos sourires de derrière le visage, ceci étant il n’y a rien de plus clair et plausible, comment réussir à être dans le sens des mœurs et rester fidèle à ses idéaux sans en arriver à ce dérangeant raisonnement ?

S’il vous plaît ne quittez pas la salle, il y aura un buffet à volonté et un speed-dating à la fin. Je veux simplement vous signifier que la mode de la multiplication des identités à partir d’un individu construit des impossibilités inconciliables pour le bonheur discutable de certains. Et ceci est à la fois un problème permanent et une solution provisoire, mais en aucun cas une vérité partisane.

Maintenant, chers confrères, chères consœurs, je vais vous citer le cas d’un sujet assez troublant et révélateur, un multirécidiviste exempté par son entrejambe et Marc Dorcel de toute espèce de moralité, puisqu’il faut des coupables pour faire des exemples. Je suis resté comme médusé devant la fougue et le cœur qu’il offrait dans ces récits porno affectifs. Et pour cause ! Selon ces dires, sa quête – celle qui se dessinait au travers de ses aventures extra ou intra conjugales – était uniquement guidée par la connaissance de la Femme, ça et rien d’autre. Vous me croirez si vous le voulez, mais c’est les larmes aux yeux qu’il m’avoua avoir échoué en tombant plus ou moins amoureux, la quarantaine passée, bêtement en allant au distributeur de préservatifs, un soir de Ligue des Champions et de maris absents, d’un de ces amours de brochure de concessions funéraires. Depuis il est inconsolable et l’optique de ne devenir qu’une image inamovible dans le regard de l’autre suffit à sa peine à perpétuité. A-t-il payé ce je ne sais quoi ou faut-il l’émasculer dans le doute ? Ce choix est plus tendancieux que la rupture en elle-même, non ?

Mais, j’ai également en tête un autre spécimen, caucasien, middle-class, catholique, de droite, jusque-là rien d’anormal. Celui-ci croyait dur comme fer avoir vu l’Amour, comme certains voient Dieu ou Elvis et il n’est pas revenu indemne de cette révélation mystique à l’eau de rose. Notez bien qu’à la base ce jeune homme respectait tous les critères de l’Homo-pragmaticus, sensible sur commande, viril dans la chambre ou dès la nuit tombée, équipé d’un avis à utiliser en dernier recours, stabilité humoristique et financière, ne vouant pas un culte à sa mère et avec de l’amour propre en option. Un modèle haut de gamme, rien à redire. Mais suite à cette révélation divine, il a fauté – non pas en forniquant, mais en offrant ses sentiments, malédiction – alors que sa relation monogame était homologuée comme amoureuse ! Plus je l’écoutais murmurer son histoire en ravalant ses sanglots, plus sa voix sonnait juste, son regard devenait certain et persistait dans l’aveuglement. C’est donc cela l’Amour ? Je n’ai pas réussi, pardonnez-moi chers confrères, chères consœurs à répondre à cette question, mais la nature éphémère de celui-ci lui confère une authenticité que le temps ne pourra jamais lui donner, jamais.

De ce témoignage là, nous pouvons tirer deux enseignements. Premièrement que la trahison est inhérente à la nature imprévisible des individus, de leurs sentiments et dans un second temps que seuls les justiciables avancent car ils n’ont personne à qui transmettre leurs colères. Concernant l’autre partie, peut-on deviser en se disant que se soigner c’est oublier et que par voie de conséquence mieux vaut se morfondre que pardonner ? Elle et lui, lui et elle emportant au fur à mesure des collisions de phéromones des morceaux de leurs icônes, de leurs vestiges, de leurs victimes, de leurs vertiges, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien, même pas un souvenir. Je crois en cela, la mémoire fusse-t-elle amoureuse, chacun en dispose et s’en accapare, mais qu’à trop espérer, à trop donner, on n’est plus soi-même, on n’est plus bon à aimer.

En définitive ce que je retiens de cette expérience d’hommes connaissant sans comprendre et de ces femmes qui pensent à leur place, c’est que tout ceci n’est qu’une dispute autour du mobile – mais pas du crime – et un motif suffisant de croire. C’est donc de cela dont il s’agit, la peur d’une vie sans religion à deux et je partage partiellement cette frayeur. Plus que la peur de la solitude, il y a la peur de perdre. La différence est ce qui nous définit les uns envers les autres, alors pourquoi ne pas être des opposés pour mieux se retrouver ?

Mes chers confrères, mes chères consœurs membres des cœurs brisés et des obsédés anonymesTM, demain nous discuterons ensemble de l’impact d’un animal de compagnie dans la stabilité déjà bien précaire du couple…

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Je suis venu vous dire qu’il est parti… Et que son retour n’est pas une option ! Nous y sommes, comme à chaque fois, ce moment suspendu et furtif où en l’espace d’une seconde ineffaçable quelques mots froids solennellement alignés ouvrent une porte – précédée de trois lents, longs et secs « Toc, Toc,Toc » – avant de la refermer à jamais sur celui ou celle qui la tient fébrilement ou férocement. Je crois qu’à chaque fois que j’apporte la mort officiellement dans un foyer en pleine expectative espérant un miracle sans y croire, ma respiration trahit ce que mon cœur fuyard puis implosif nie et, durant cette partie de cache-cache lorsque qu’il ne me reste que mes entrailles pour me vider ainsi poliment devant la peine d’autrui, j’en suis à implorer la violence plutôt que le silence.

La mort est une manie incurable, une œuvre posthume, une industrie sérieuse et perpétuelle, surtout en temps de guerre, et plus on la déshumanise moins on s’en souvient. Dans mon métier, on tire avant de parler et maintenant que pour moi il n’y a plus de cibles mouvantes, j’ai du mal à reprendre la parole sans m’accrocher piteusement à la personne en état second à laquelle je m’adresse pour la première et dernière fois. Je dois faire preuve dans la mesure du possible de la plus grande des considérations administratives, mais en aucun cas de compassion fraternisante car elle me rappellerait à la vie puis à la peur pour me laisser sans ferveur ni victoire.

Quand les portes claquent de rage ou d’abandon, quand les sanglots s’étouffent mutuellement, quand l’hystérie résonne jusqu’à qui veut l’entendre, j’ai déjà tourné les talons d’un pas aérien et dans un bruit sourd. Mes yeux dans ma tête et elle-même dans mes mains, en vitesse de croisière, je prends la fuite en cherchant nerveusement mes clefs de voiture, le souffle las de tout ça, je ne regarde ma cible dans le rétroviseur qu’une fois l’envie de vomir et le besoin de pleurer passés. Il faut croire que j’ai en moi plus de regrets que de courage, la survie est à ce prix.

La bravoure apparemment ne s’achète pas, ne se loue pas, ne se prête pas, on nous la donne en médailles, en discours, en félicitations, en reconnaissances si l’on tient suffisamment longtemps pour ne plus être comme tout le monde et que l’on a la décence de ne pas trépasser pour en jouir en société. J’estime amèrement être entre les deux, normal et absent, colonisé de cauchemars qui ne sont pas les miens, persuadé que tout le malheur du monde repose sur mes épaules et que j’en suis responsable en dépit du fait que l’on ne m’a rien demandé ! J’aurais pu choisir en premier lieu les joies de l’autodestruction, mais au moins avec l’auto flagellation, j’aurais le temps nécessaire de faire pénitence envers je ne sais pas qui ou de trouver un sens à je ne sais pas quoi !

Mais pour l’heure, derrière les stries de mon verre à moitié plein, je regarde les Hommes tomber en faisant du surplace sur leur passé d’ancien combattant et de nouveau combattu. Ceux qui reviennent entiers ou pas de l’industrie de la mort gardent toujours en souvenir une partie du capital de l’usine qu’eux seuls peuvent comprendre, alors l’amour et l’amitié n’ont pas leur place sur ce chemin étroit, sinueux et incertain. Et les jours défilent les uns après les autres comme pour me narguer pour toujours, comme pour me garder sur mes deux jambes, comme pour me protéger de moi-même. Mi-temps, pause, pouce, je n’en peux plus, ce soir je vais mettre ma tête à l’envers afin d’y voir plus clair, enfin jusqu’à demain.

J’ai fait mon devoir, j’ai servi mon pays et il est fier de moi comme ils disent. J’accepte plutôt bien et je ne rouspète plus, ceci étant j’ai une menue réclamation à présenter. Certes, on ne ramène pas les morts à la vie, mais concernant mon temps, qu’en est-il, comptez-vous me le rendre ? Ce n’est pas que je n’aime pas ma patrie, mais mon répit j’y tiens absolument puisqu’il est tout ce que j’ai et, par dessus tout, ce que je suis intimement – les photographies de mes vacances diplomatiques l’arme à la main ne me vont que peu au teint ! On m’a répondu que l’armée ne pouvait rien pour moi concernant ce dossier « sensible », mais je pouvais toujours si je le désirais m’adresser au vendeur de religion de mon choix…

Le truc avec les mutations, les missions, les délocalisations, c’est que l’amour ne rentre pas nécessairement dans un kit de survie et que les relations à distance ont été créées pour la mythologie de l’adolescence où tout est pur, même la tromperie. J’aurais dû m’en douter, c’était inéluctable, c’est toujours mieux comme ça et je m’en remettrai ! Toujours est-il qu’en apprenant la patience à force de correspondances, d’illusions et de masturbations, personne ne m’avait indiqué au préalable qu’il y aurait des conséquences, tel que mon remplacement par un autre dans ton lit. Nul n’est irremplaçable, certes, mais biodégradable, là s’en est trop ! Je trouverai une autre partenaire de vieillesse, c’est sûr, mais l’amour…

Ponctuels ou retardataires, nous sommes tous égaux devant une mine anti-personnelle ! J’ai beau retourner ma scène d’héroïsme attitrée et homologuée dans tous les sens, saoul ou sobre, je n’arrive pas départager honnêtement le facteur chance de la stratégie des statistiques. Le timing, le seul et l’unique, j’ai très longtemps cru naïvement qu’il était l’une de ces sciences exactes comme les programmes télés, les soldes privées ou les déclarations de paix, mais il m’a fait faux-bond au moment où j’en avais le plus besoin, me démontrant qu’avec une armée ou un pays derrière soi, on ne peut raisonnablement compter que sur soi.

Malgré tout cela, j’ai gardé l’uniforme, par habitude plus que par foi sans doute, et puis il faut bien faire quelque chose pour être quelqu’un, pas vrai ? Quoi de plus étrange, non, en fait, quoi de plus logique que d’envoyer une personne habitée par la mort pour annoncer celle de ceux qui ont perdu leur droit à la vie ? Le visage rigide et fermé, le regard glacial et humide, la voix intangible et méthodique, je viens donner ce que personne ne veut recevoir sauf moi. Et lorsque la vie de leurs enfants, de leurs maris se termine, certains n’y voient que colère et effondrement, moi je n’y vois qu’amour…

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Heu… Je crois, enfin, je pense, hum… à moins que je n’invente… mais il me semble qu’embourbé corps et âme dans mon mensonge, j’ai toujours voulu raconter une histoire le plus simplement du monde pour qu’elle existe par elle-même, avant de la vendre à quiconque ! La narration, le mime ou la ventriloquie, quelles curieuses façons d’admettre que l’on ne peut décemment vivre seul ici-bas et qu’en dépit du peu d’intérêt du public, chaque personnage a besoin d’un spectacle pour patienter le temps d’une vie. Ma saugrenue contribution au système du récit humain réside dans le choix plausible, les perspectives possibles et les fins alternatives, si tenté que l’issue finale en soit une.

Puis, sans s’en rendre compte, les histoires que l’on raconte pour les autres nous dépeignent mieux que l’amour ou l’amitié. Dès lors, on ne sait plus, pardon… je ne sais plus si je dois les vivre pleinement en priant qu’aucune autre imagination ne vienne me les ôter ou si je peux m’en souvenir à jamais en ignorant qu’elles appartiennent à ceux qui les traversent. Ma vision, ma version, mon chapitre, mon histoire, mes pronoms possessifs, pour tant d’auteurs et plus d’acteurs encore, le récit ne peut ainsi se restreindre indéfiniment à mon désir et suivre ma volonté sans que celle-ci ne me corrompe un jour prochain. Vous savez… enfin, peut-être vous ne savez pas, mais… sur la multitude des routes qui jalonnent le domaine de l’imagination, il y a deux types de voyageurs bien spécifiques : les poissons-pilotes et les poissons rouges ! Les premiers suivent le modèle dominant d’évasion générale et les seconds vivent d’indénombrables fantaisies en les oubliant toutes sans exception. Lesquels sont les plus heureux selon vous – puisque c’est le but avoué, envié ?

L’imagination… arghh… pfff… quel mot fantastique et enivrant à la fois ! C’est le bonheur absolu, puis l’euphorie permanente ! Oui, oui, l’imagination… Oui, c’est ça, ceci doit certainement la distinguer des rêves inaccessibles et des cauchemars incongrus ! Rien n’est moins sûr. Pour tout dire, à partir du moment où l’on a commencé louablement à mettre les histoires en boîte pour observer en troupeaux, tapis dans le noir obscur, il était à parier que celles-ci arriveraient à leur terme avant même qu’elles ne soient imaginées. Sachant que même dans les tragédies les plus modernes et modestes il faut un coupable, j’en désigne un afin qu’on le regarde comme une bête de foire, si cela est encore possible. Le voilà, tout près, juste à côté, ce phénomène se résume en un seul mot : la vitesse, la seule, l’unique et l’inarrêtable. Par la même occasion, laissez-moi vous rappeler que la vérité et son contraire sont devenus le régime de pensée en vigueur dans la société de ceux qui vivent couchés, de ce fait tout n’est une question vulgaire de preuves factuelles et de démonstrations grossières. Adieu, histoires à dormir debout !

Mais, avant d’aller – si vous le permettez – plus loin dans vos têtes, revenons un bref instant sur les lieux et l’horaire du crime, le point de bascule où j’ai choisi de ne pas choisir entre l’opportunité et le mobile. La vraie question est celle-ci : Imaginer ou Croire ? Quelle affaire que celle-là ! S’affranchir des limites toujours plus jouissives, lointaines et mères de perdition ou en imposer afin d’avoir la maîtrise des espoirs que génèrent celles-ci ? Quel dilemme ! D’une responsabilité à une autre, j’ai opté pour le pouvoir où ma morale ne serait pas un ennemi amical et qui, en outre, ne me lesterait pas vers la réalité au gré des déboires de la machine-monde.

Et comme il ne peut en être autrement, les jalousies immobilières, charnelles, monétaires et théologiques chantent à l’unisson la sérénade, puis le requiem de la discorde terrestre pendant que l’histoire s’efface peu à peu des esprits avant d’être prise à part, à témoin à l’heure des excuses informulables. Je dois confesser, malheureusement presque amusé par la répétition des événements, que les diversions en tout genre trustent les préoccupations de chacun. Et voilà le slogan « tuer le temps avant qu’il ne nous tue » ! Et voilà le refrain ! Alors que reste-t-il comme place à ma petite entreprise de divertissement ? Vous me direz vraisemblablement que l’ère du virtuel peut pourvoir à mes besoins, certes, mais au vu des états de service de l’original, je refuse de donner le peu de crédit qui subsiste en moi à la pâle copie qui tente de le supplanter par tous les stratagèmes identitaires pensables. J’admets bien volontiers que la nécrophilie – courante et universelle – par les armes ou pour Dieu possède en elle l’adrénaline et le mysticisme que mon spectacle, trop vivant pour être une fable, ne peut suggérer à des malades imaginaires.

Au pays des hypocondriaques, les mythomanes sont rois. Dans tous les contrats qui vous veulent et vous vendent du bien, les clauses en petits caractères érigent les sanctions divines ou pénales contre la promesse de vente de votre jardin secret et la part d’enfance que vous cachez au fond de vous. Je ne fais pas les comptes à l’amiable seulement les histoires équitables, et pour cause, je fabrique artisanalement des explorateurs d’eux-mêmes et pas des fanatiques d’un autre. Mais après y avoir tant cru, puis en avoir eu aussi peur, et fort logiquement avoir peur d’y croire, les plus fervents, les premiers finissent par espérer n’importe quoi pour ne plus avoir peur…

Avoir des principes – quelle prétention bien élevée, bien élégante ! – et vivre avec, cela se révèle être un défi des plus périlleux. Quant à l’application de ceux-ci au quotidien, en voilà une folie bien pragmatique ! Certains en ont perdu la santé, beaucoup leurs esprits et les autres leur âme. Par vanité et sûrement épris de mon idéal, j’ai longtemps montré d’un doigt inquisiteur la religion et ses actionnaires pour mieux me détourner de ma fierté virginale car seule l’histoire comptait au départ. Mais l’usure des répliques et la redondance des fins m’ont persuadé que le conteur faisait le récit, pas l’inverse. Au bout d’un moment comme tout ceux ne pouvant pas se résigner à tirer leur révérence, j’ai commencé à trouver des excuses en confondant création et rediffusion et comme cela était déjà écrit, j’ai préféré le Diable à l’oubli !

Le Diable, lui, ne vient jamais par ses propres moyens. Il est le plus souvent précédé par l’Amour, authentique et éternel, ce mystère quelque peu prévisible obtenant plus qu’il ne donne au moment où il prend consciencieusement congé de nous. Le mien avait le teint laiteux et parfois carmin devant l’antre de notre chambre, son regard ne se dirigeait que dans ma direction afin de me détourner de mon admiration, car l’Amour qui se contemple n’en est pas un. Il avait les mains trop petites pour les miennes, l’évasion était certaine, mais il me donnait matière à convoitise lorsqu’il m’offrait sa poitrine pour que la nuit me trouve, enfin. J’ai su sans savoir ni sentir qu’il allait me quitter faute de temps, comme toujours, comme tout le monde. Et, dès lors, je lui ai demandé ce que mon imagination ne pouvait me procurer, un rêve éveillé, un enfant de lui. Mais un objet du souvenir, on le garde férocement et on ne lui parle que peu de l’avenir.

Tant que je pouvais raconter à ce souvenir vivant, te ressemblant, toutes les histoires possibles et imaginables qu’il n’aurait pas à expérimenter de lui même, l’illusion tenait ses promesses de captivité et la magie des mots suffisait pour être dite et entendue. J’ai honte… comme vous pouvez le penser… mais l’alcool remplit son office en m’éloignant du but de mes histoires avec une rigueur que mes démons devraient adopter. Fou est celui qui pense maîtriser le récit d’autrui alors qu’il n’a jamais vraiment eu la main mise sur le sien et c’est cela que j’avais oublié pour mieux me le remémorer le jour fatidique où le souvenir vivant m’échappa, se détourna et s’enfuit.

La narration n’a pas de chaînes, peu de lois et encore moins de biens. Alors, j’ai repris mes esprits et ma plume…

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Jadis, je croyais fermement qu’il fallait crier pour aimer et suivre les ordres pour être aimé. Petit, avant que je ne prononce moi-même mon nom pour savoir qui j’étais je n’existais que dans la bouche de mon père, à l’époque où le monde tournait outrageusement autour des silences rhétoriques et de son regard rédhibitoire. Chacune de ses paroles assenées avec affection, mais sans le packaging, retentissait dans ma petite planète – faite de jeux d’adultes et d’innocence dérobée – comme le jugement dernier. Et celui-ci ne s’interromprait pas tant que l’homme château de carte qui donnait un sens à mes peurs ne s’en retournerait pas sur ses talons afin de trouver des mots pour comprendre sa propre violence.

Après avoir goûter, sans vraiment m’y habituer, à ses coups de tonnerre pour la énième fois, j’étais comme fasciné dès qu’il me regardait presque absent, mais totalement présent du haut du monde de ceux qui savent déjà tout mais qui n’apprennent rien. Lui, le père, ne savait pas s’il devait rire d’espérance ou pleurer de résignation en posant les yeux sur sa progéniture, sa créature, sa boîte à souvenir, à avenir. Je ne voulais pas le décevoir, comme si cela était possible, souhaitable, mais je n’ai jamais compris ce qu’il voulait en faisant tomber la nuit sur moi et lui non plus au bout du compte, pensais-je. Alors, nous nous taisions en soufflant en canon et c’était bien ainsi…

Parfois, lorsqu’il perdait pied dans sa réalité, il arrivait à s’extirper subrepticement de sa retraite faite de silence avérés et de sanglots refoulés. Comme tous les Hommes, il cherchait de manière psychotique des vestiges de la mère que je ne connaissais pas – la sienne ou la mienne – pour lui venir en aide, pour lui donner la force nécessaire, pour avoir de quoi croire juste un jour de plus. Demain n’existait pas pour lui. Mais il fallait s’y préparer et y survivre coûte que coûte, uniquement pour recommencer le jour suivant jusqu’à en avoir assez des pourquoi ! Je n’étais pas sûr de comprendre tous les tenants et les aboutissants de cette lutte que je ne voyais pas chez les autres, mais elle était notre héritage et je le porterais bien assez tôt.

Le temps, qu’on le veuille ou non, on le subit et pire on le regarde faire, une main dans le dos sans rien dire parce qu’il n’y a rien à expliquer, à demander, à combattre. Il faut juste vivre avec, voilà à peu près ce que mon père voulait me laisser comme mémoire en s’obstinant sans plaisir à ne jamais me donner le mode d’emploi de l’épreuve qu’il m’imposait. L’an 1. Le jour où il a voulu m’apprendre à nager en me catapultant sans mon autorisation dans un étang qui ne s’était pas lavé. J’aurais pu me noyer, j’aurais dû, j’aurais pu nager, j’aurais dû, finalement j’ai flotté, mais l’eau, elle ne s’en est pas enquise et ma leçon était donc celle-ci ! Alors, c’était à moi de voir si je voulais abandonner ou continuer jusqu’au jour où je perdrai comme tout le monde.

En outre, dès qu’un bref et rare moment d’évasion fantastique s’offrait à moi en levant la tête vers les nuages en perpétuelle mutation, mon père ne pouvait s’empêcher de les étrangler de ses propres mains sous mes yeux, naturellement. Comme pour me faire rudement comprendre à sa manière qu’il n’y a rien à voir là-haut, circulez, parce qu’à y prendre goût trop rapidement, trop souvent, on ne sentait pas la chute et je finirais par ne voir que le sol en le prenant à témoin de mon mode de vie. Mon champ de vision devait se résumer désormais à droit devant, sans espoir de regarder en arrière. À force, j’allais devenir fidèlement ce que je vivais tant bien que mal et certainement pas ce à quoi que je rêvais les yeux grands ouverts durant mes crises de bonheur idéal. Du coup, je ne connaissais pas la déception !

Avancer, avancer, c’était le maître mot avec lui, avancer toujours et encore, sans s’embarrasser d’un quelconque but qui ne parle qu’aux croyants, sans s’encombrer de qui que ce soit qui ne s’adresse qu’aux vivants. Je crois, enfin, je doute que mon père n’ait jamais eu confiance en une autre personne que moi et le drame, c’est que je ne connaissais définitivement pas le sens de ce sentiment, car on le comprend qu’une fois qu’on nous l’a ôté, donc il a dû partir.

La dernière fois que j’ai vu mon père me parler avec le visage déformé à l’extrême, les cordes vocales prêtes à se déchirer, les veines proéminentes, les tempes puis le système lacrymal au bord de l’explosion, il essayait inlassablement de m’enlacer tout en m’écrasant,  me donner quelque chose tout en me l’imposant, étrangement, rien à avoir avec un présent qui offre un sourire en prime, mais plutôt une part de sa prison, interne, enfantine, amoureuse où la liberté – dont il aimait à promouvoir ses vertus en tempêtant – n’a jamais aussi bien résonné. J’aurai tant voulu lui donner une clef, la bonne, une porte de sortie, l’unique ou bien un morceau de mes nuages en échange de son trouble, ce bourdonnement incessant, persistant, assourdissant et dépourvu de trêve qui était le sien depuis son enfance soldée sur l’autel d’un père qui n’en était pas un.

Moi, le mien de père, il en était un, il n’avait pas besoin d’être un quelconque héros puisqu’il était là. D’autant que je m’en souvienne et plus je fouille dans ma mémoire morcelée pour avancer vers mon destin déjà bien ficelé plus il me reste des clichés au détail près de paysages défilant sans discontinu les uns après les autres. Mais il n’y a personne pour les habiter, si ce n’est la voix de mon père qui supervisait la visite guidée – aussi confuse que rassurante – de ma psyché en convalescence depuis l’enfance. Et dans ces moments là, touché par la grâce, le trouble, mon trouble s’efface de ma prison sur mesure, à croire que le bourdonnement incessant, persistant, assourdissant et dépourvu de trêve, c’était les autres après qui l’on court toujours et qui ne nous rattrapent jamais !

J’ai dû perdre la faculté apparemment obligatoire d’aimer, le jour où mon père a préféré me quitter durablement au lieu de fuir encore une fois, droit devant. Je n’ai pas eu le luxe de me retourner sur ses pas pour lui dire au revoir, il a fait en sorte qu’il soit déjà trop tard. Il m’a donné ce jour là l’amour qu’il n’avait pas, enfin, je ne sais pas, je crois, je le demanderais certainement à mon tour à mon fils quand je ne serai plus, peut-être que lui il m’entendra…

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J’ai… J’ai… J’ai, hum… J’ai des problèmes de silence, je les voudrais de circonstance. Je ne manque plus de rien, mais pourtant je me démantèle de l’intérieur, petit à petit, sans jamais m’arrêter pour mieux mettre ma conscience en accusation aux yeux de ceux qui m’aiment. Vide à en perdre l’équilibre le jour et plombé à en baiser le sol la nuit, je regarde mes cheveux tomber et mon ventre prendre de l’avance tranquillement sur mes pieds. Durant mon temps libre, je cherche cette absence.

À défaut de la trouver en moi, je la traque sans relâche dans les travers de ma femme et la discontinuité de son amour quand elle dort, de ma famille et de leurs pannes de téléphone lorsque j’ai un début de migraine, de mes amis qui ont l’audace de me parler de leurs problèmes en à ma présence, de mes collègues et de leur carrière qui doit de plus en plus se pencher afin de m’apercevoir. Pourvu que ce ne soit pas de ma faute, de ma responsabilité, alors tout va pour le mieux. Mais cette dépression qui me berce et cette mélancolie du temps qui se fige, elles ne sont pas dupes et me réclament un peu de ma réserve personnelle de bonheur en échange de leur silence. Vous savez, le spleen, c’est comme le croque-mitaine, ça n’existe pas, c’est fait pour faire peur aux enfants et aux éternels adolescents !

On pourrait légitimement dire que je fais l’enfant, que je le joue, le surjoue dans un costume d’adulte – plus proche de la fin que du début de quelque chose – alors que celui-ci ne veut plus rien savoir du temps et de la distance qui s’écoulent. Et pour cela il ferme les yeux, arrête de respirer et se bouche les oreilles. Mais à un moment donné, je dois refaire surface et je ne veux plus avoir à faire avec mon pèse bonheur ou pèse malheur, c’est selon votre définition de la convalescence ou de la rémission. Je… Je… Je, hum…Je voulais juste ne plus rien sentir, quitte à n’avoir plus rien, rien !

Rien, hum, rien du tout, mais, alors rien, c’est une idée du néant qui a trop de sens pour que je puisse l’accepter et dormir dessus, tout compte fait. Mais mon tourment originel était toujours aussi abyssal pour moi. Ma libido ou mon psychiatre, pourquoi ne pas louer celui de quelqu’un d’autre ? Un nouveau vague à l’âme ! Un de ceux qui souffrent en silence et qui n’attendent rien du bonheur si ce n’est un jour de plus avec son passé. 21 grammes de poète, voilà ce qu’il me faut, rien d’extravagant, un peu de cet alarmisme salvateur, une pincée d’amour perdu à jamais, et quelques munitions pour toucher ce qu’il vise juste, rien d’autre, rien…

Me voici renaître sans recommencer, me questionner sans douter, en pleine déconstruction avec mon monde à réinventer, prêt à tout quitter sans jamais bouger. Je… Je… Je, hum…Je dois avouer que dans les premiers temps la joie nouvelle qui m’habitait prenait le pas sur tout jusqu’à ce que je disparaisse pour de bon, que je ne reconnaisse plus l’âme en peine dans le miroir, que mon odeur m’ait abandonné, que ma femme n’ose plus me toucher pour se persuader que ce n’était pas moi, plus moi. J’étais en présence de mon absence.

Le comble c’est que j’étais parfaitement dans mon rôle, dans ce qu’on attendait de moi, de ce qu’il était bon de montrer. Et je pourrais m’en satisfaire puisque faire semblant est mon métier. Ceci étant, je n’ai pas à construire de personnage la nuit à l’horizontale, les yeux grands ouverts à fixer le plafond sans que celui-ci ne daigne répondre aux questions que je ne me suis pas assez posées ! Je… Je… Je, hum… Je repense à ces souhaits qui n’ont d’autre intérêt que leur invocation et non leur accomplissement. J’ai eu ce que je voulais, je suis devenu ce que les autres désiraient, j’ai donné ce morceau de moi qui n’a d’existence qu’en me quittant, puis j’ai pris celui de quelqu’un d’autre, à qui je ne pensais rien devoir, sans réfléchir, comme un dû. Et maintenant j’ai une dette à la place du cœur.

Et pour la première fois de ma vie je comprends, peut-être trop tard, que je n’ai jamais été seul, que la meilleure des compagnies ne donne pas son nom, elle nous comprend sans nous juger, elle nous ressemble sans rien demander. Je n’ai… Je n’ai… Je n’ai, hum… Je n’ai plus de quoi pleurer, personne à incriminer pour les exactions du quotidien. Personne, mais vraiment personne. Merde, j’ai perdu quelqu’un ? Le malheur ou le bonheur, cela ne reste que des indices de satisfaction de l’existence en cours, des motifs de prétention ordinaires, sans aucun recul. Et si j’en profitais tout bêtement, comme ça, en faisant les comptes des bons et des mauvais points à la fin de mon préavis ?

Mais pour l’instant mon problème logistique est bien plus basique, banal, du domaine de l’échange équitable. Rendre cet autre moi, enfin toi à son propriétaire et récupérer cette part de moi qui me fait tant défaut, quelque part. Je constate que je n’avais jamais autant voyagé dans ma tête, sa tête, notre tête. Il me fallait à présent utiliser mes jambes, ses jambes, nos jambes pour me retrouver, pour la retrouver, pour nous retrouver. Mais le seul inconvénient dans les fantaisies – mise à part leur vacuité – c’est qu’elles n’ont pas leur place dans la machine à broyer de la réalité. Je me suis donc retrouvé, mais avant que je n’arrive tu es morte d’un long suicide sans morceau de toi, à cause de ce morceau de toi que je garderai pour toi, maintenant, en attendant que tu reviennes, un jour, peut-être…

J’ai… J’ai… J’ai, hum…J’ai si souvent parlé de la solitude gratuitement, juste pour mettre un mot sur mes égarements, uniquement pour clore une demande d’affection désintéressée que j’ai presque peur de lui dire au revoir à l’idée que les choses reprennent leur cours de manière anonyme, orpheline. Un souhait qui s’exhausse, c’est déjà une part d’idéal qui s’enfuit, mais une quête qui s’achève, c’est presque pire. Les questions ne sont rien, vraiment rien, rien, face à la fin. Alors, dorénavant j’aurai ma conscience pour moi et mon âme m’aura pour elle.

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Sérieusement ?! Vivre selon la manière que l’on nous a enseigné sans y réfléchir, quelle étrange façon d’attendre patiemment la fin ! J’étais là, à l’heure, au bureau, sur la chaîne multidirectionnelle à végéter professionnellement comme tous les jours, à donner de l’importance, à exiger du sens à ce qui n’en avait pas. Mais la vérité vraie, c’est que je m’ennuyais autant que j’étais vide. Et je souhaitais intimement l’arrivée d’un signe, un seul, même le plus dérisoire pour avoir enfin une excuse pour sortir de ce corps trop étroit pour moi !

Le plus drôle dans cette farce, c’est la chute. Le prophétique signe en question est venu m’assommer d’un coup sec et ferme sur la nuque, mais il ne ressemblait pas au nouveau départ providentiel que j’escomptais. L’heure de la fin de mon mariage m’avait sonné les cloches et en plus d’être abasourdi, il me fallait fuir pour ne pas affronter la vérité. J’aurai pu tenter de m’investir dans la drogue, mais le problème avec les grands 8, c’est que les sensations aussi démentielles qu’elles soient sont toujours en location. Alors dites-moi où vont les hommes lorsque leurs ombres les suivent à toute allure jusqu’à disparaître ? A la guerre, voyons, ils la font mieux que l’amour !

Enfin en vacances dans l’exil oriental, l’œil hagard mais perçant, les mains moites et lourdes, le corps suspendu en équilibre par cet alcool qui me le ferait perdre à la moindre défaillance, je tente de me convaincre que je suis ici pour une bonne raison et surtout par choix, alors que je recherche simplement, désespérément, un peu d’humanité, un contact peu importe qui il est. Et sur cette terrasse bondée frappée par l’air froid de la nuit tout en nous protégeant des assauts du désert, il n’y a personne pour me regarder, pour me rassurer sur mon existence. Mais me raccrochant à une image, je trouverai bien quelqu’un ! Certains ont des visions, moi j’ai de l’intuition…

Ce quelqu’un et moi, nous nous sommes trouvés tous deux que nous étions, en perdition vers une guerre qui ne voulait pas de nous et ce parce qu’il le fallait. Nous ne ressemblions ni l’un ni l’autre à des vendeurs de causes. Je me dis souvent que la paix est un motif, pas une méthode et en regardant dans ses yeux aussi hallucinés que convaincus, je savais que je le suivrai même au prix de ma folie passagère, d’un asile permanent et de mes dernières économies de croyance. Je voulais savoir. « Allô la Terre, ici il n’a plus de que nous… May Day…May Day… May Day… »

Lorsque l’on commence à appeler à l’aide jusqu’à s’en rompre les cordes vocales et abandonner son orgueil, on peut s’avouer honnêtement que l’on a trouvé quelque chose à perdre. Merde, je préfère ne plus me retourner, tout cela n’est qu’un souvenir ! Dès que j’ai commencé à croire en lui, le rêveur éveillé et son histoire de pacification par le cœur et l’esprit – sans hostie ni confession et encore moins de guerre sainte – j’ai senti la force pour la première fois me parcourir des racines jusqu’aux bouts de kératine mal coupés ou peut-être que c’était l’Inconnue qui m’a défibrillé. Avec cet agent dormant à la poursuite de son ancien coma et ma quête haletante d’un sujet auquel je pourrais me rapporter, nous errions au gré des facéties du destin pour pourchasser les indices laissés par l’Office du Tourisme. Je ne prétends pas avoir trouvé des réponses pratiques, mais des questions certainement, fussent-elles encore les bonnes !

Le plus troublant quand on se perd au milieu de nulle part, c’est qu’il n’y a pas de fin et que tout autour de nous, de moi, je ne vois que l’échec grandeur nature, alors qu’avec le temps je m’étais si bien accommodé des petites défaites ordinaires. Depuis, je doute de tout même de ma peur au ventre. Mon psychiatre et les anxiolytiques apprécieront. Je tournais en rond tout en avançant entre le délire commun et l’abstraction hasardeuse, avec mon partenaire, le rêveur éveillé qui regardait fixement les nuages prendre la forme de son esprit ou l’inverse. Je le vois aussi ? J’imagine aussi ? Je le crois aussi ? Tout ça n’est-il pas la même chose à vrai dire ?!

Ha Ha Ha Ha Ha, Hum, Ha Ha ha ! En y repensant câblé de toute part depuis mon lit d’hôpital, si tout cela s’est produit c’est parce que j’avais égaré dans un coin de mon pragmatisme ma foi, voire un peu de moi-même et beaucoup de ma moitié. Je cherchais un ami, un guide, une béquille, un phare dans la nuit, n’importe quoi auquel m’accrocher pour ne pas sombrer corps et âme dans une vie à la chaîne où l’on peut se sentir si bien sans s’en rendre compte le moins du monde. Je ne reproche rien à personne de mes erreurs et la plupart des gens semblent heureux avec le bonheur qu’ils imaginent, mais je ne veux ni ne peux vivre avec une étiquette sur la tête. Et aux côtés de mon ami le rêveur éveillé, j’ai trouvé ce qu’il n’y avait pas dans l’amour des noces périssables : un but et la tranquillité. Paradoxal me direz-vous, je verrai bien…

Le rêveur éveillé n’était pas du genre à parler pour combler les silences par des prêches, des promesses ou des excuses, mais il nourrissait mes absences de traces à chérir par ses mémoires alternatives. À tout bien considérer, j’avais passé la majeure partie de mon CDI sur Terre à m’en plaindre, en regardant les autres partir ou revenir, mais surtout partir dans tous les cas. Lui vivait ailleurs à la frontière de l’horizon et de la folie sans espoir de retour, mais il semblait serein. Et ce jour là, le mot arme a pris tout son sens ! J’ai mis le doigt dessus, sur la détente voilà ce qui me manquait pour regarder au loin sans la moindre angoisse, gêne, culpabilité ou besoin marketing de liberté.

Déjà enfant à l’époque où je voulais faire Jedi comme métier dans la vie, j’étais intrigué par le pouvoir de la foi, vous savez, c’est le genre de chose dont tout le monde fait la publicité aisément, mais personne n’est prêt à en vendre ou en prêter. Mais au fond je voulais tout simplement ne pas perdre le contrôle, je pense. Mieux vaut un parfait fidèle qu’un pèlerin ingérable. Maintenant aux commandes de ma propre croyance, je ne compte pas multiplier les pains ou faire du Moonwalk sur l’eau pour divertir la galerie, mais j’ai la ferme intention de foncer frontalement dans ce mur en face de moi et de le traverser parce que j’ai la foi, j’ai ma foi ! Suivez-moi !

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