les agoraphobes en manque de chaleur humaine ou de chair fraîche
Chers membres du Fan club de l’observatoire des sociétés mourantes.
Si je vous ai réunis en ce jour, c’est que l’heure est grave ou qu’il n’y a plus de gravité.
Entre le repli communautaire universel et les schizophrénies identitaires, à bien y réfléchir, je dirai que c’est le mur qui nous fonce dessus.
Peut être parce que nous sommes sous tutelle du passé, absents du présent et nostalgiques de l’avenir.
Mise en bouche
S’il y a un bien une partie de la population qui mérite la peine capitale en viager ou une grève à durée indéterminée, ce sont bien le gens du métro.
Ne vous méprenez pas.
Quand je dis « Les gens du métro », je ne parle pas des professionnels de la mendicité césarisables ou ces culs-de-jatte et autres estropiés extracommunautaires adeptes de « world musique ».
Quand je dis « Les gens du métro », j’évoque encore moins ces barbouzes amateurs et intégrés estampillés RATP, ex-agent de sécurité dans une superette de périphérie.
Quand je dis « Les gens du métro », je pense à eux, là, assis à côté de vous.
Eux, usagers et actionnaires des transports en commun.
Coincés entre le refus du protectionnisme de l’industrie automobile et la pression morale du Grenelle de l’environnement.
Alors, les agoraphobes en manque de chaleur humaine ou de chair fraîche, les adolescents à la fois hyperactifs et narcoleptiques, les adoratrices de la psychologie menstruelle et du hors forfait, sans oublier les lecteurs révolutionnaires endimanchés prostrés sur leurs sièges : parlons un peu de nos voisins dans le métro.
une explosion démographique
Modus Operandi :
Rappelez-vous.
C’est l’heure de pointe, vous êtes mal réveillé(e) ou pas assez endormi(e).
À chaque station de métro, il y a une explosion démographique.
Les accros du rail oscillent entre la gueule de bois maîtrisée et la chirurgie plastique artisanale.
Entre le bruit des palabres inutiles sur le film de la veille et les odeurs des parfums bon marché, vous cherchez le silence, mais il ne vient pas.
A la fin, par lassitude, vous fixez ou esquivez névrotiquement votre voisin d’en face.
Moralité, la consanguinité urbaine a ses limites.
Commençons par le voisin A : l’agoraphobe cultivé.
Tapis à l’abri derrière son journal gratuit, il s’affaire à des réflexions géostratégiques sur le Moyen-Orient ou un coït imaginaire, qu’il valide lui-même d’un petit rictus suffisant en levant les yeux sur le reste de la rame.
Il serait mal venu de reprocher à l’agoraphobe cultivé sa pathologie, sachant que la peur est instinct animal, et que la meute, la société, la civilisation n’ont fait qu’institutionnaliser la violence.
Plongé dans ses pensés, il réfléchit à son plan de carrière entre l’obtention de son BAFA ou la voie du terrorisme de salon, le spamming.
L’agoraphobe cultivé voudrait faire preuve d’un de ces actes humanitaires désintéressés, comme dire « Bonjour » ou « Voulez-vous vous asseoir à ma place ? », mais la nature anxiogène du transport en commun l’en dissuade.
Il ressaiera demain, comme tous les matins, enfin peut-être…
Passons à la voisine B, celle qui pense que son sac à main est son enfant.
Je veux bien être large d’esprit et progressiste et me dire qu’à l’instar de l’I.V.G., le sac à main est un droit pour les femmes.
Mais, à ce compte là, tout droit implique des responsabilités, voire même des capacités.
La bipolarité à la mode dans les magazines féminins, plus les appels récurrents sur les téléphones portables, sans oublier la lutte permanente pour l’équilibre dans le métro lorsque le sujet est monté sur échasse est égal, trop souvent, à une mauvaise gestion de l’espace.
Alors, merci de déposer les armes, les appendices sociologiques et autres signes extérieurs de richesse dégriffée à terre, merci.
Le sac à main a parfois un complice plus retors, ergonomiquement détestable, idéologiquement dictatorial et moralement inattaquable sous peine d’être catalogué comme criminel potentiel.
Cet ennemi est un cheval de Troie, il s’appelle la poussette.
Méfiez-vous en, prenez la fuite après le test de grossesse ou pratiquez religieusement l’abstinence.
Terminons par le voisin C, l’ersatz de racaille, musicologue, qui plus est.
La démocratisation de la culture a ses limites.
Si la finalité est de subir les obsessions de dépucelage véhiculé par le R’nb et les vérités politiquement ambidextres du rap, merci, mais non merci.
Que la jeunesse veuille s’abrutir, c’est tout à son honneur, mais qu’elle le fasse en privé.
Pour être honnête, je ne peux pas imputer l’entière responsabilité des nuisances sonores à ces quart-mondistes équipés de la dernière technologie 3 G au moment des soldes et criant à la misère sociale dès la première manifestation venue.
Les fous pragmatiques du marketing qui ont incorporé des haut-parleurs sur les téléphones portables ont redéfini notre écosystème du métro.
Le besoin d’affirmation de ses goûts proposés sans l’avis d’autrui relève de l’ennui existentiel chez l’occidental, intégré ou pas.
Pourquoi ne pas choisir un ou deux de ces jeunes, en guise d’exemple, et les pendre haut et court à la sortie du métro sur l’une de ces potences haussmanniennes ?
un parc zoologique
La loi du point final :
Entre omerta tacite et crieurs publics :
Le métro offre un parc zoologique assez fascinant où la liberté compulsive de certains tutoie la rigidité cadavérique d’autres.
Alors, je m’interroge.
Je ne sais pas, je ne sais plus si je préfère la démocratie à la taxidermie.
Chers membres du Fan club de l’observatoire des sociétés mourantes n’oubliez pas de payer votre cotisation en partant, en liquide, en nature ou en enfant.
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À lire aussi
36 15 Me Myself & I : Requiem pour un con : leçon 1 – amitié préméditée
https://souklaye.wordpress.com/2009/04/08/requiem-pour-un-con-lecon-1-–-amitie-premeditee/
Au final, comme diraient les filles : « oh non pas le métro, on prend le bus. En bus c’est mieux, on peut voir la ville! »
moi je m’en fous je ne me déplace qu’en taxi.
Ouiiiii !!!!
Une autre faune à explorer et toute aussi riche d’espèces communes : le bus. 🙂
Sur le même thème, voici deux liens (les miens) dans un style un peu différent 😉
http://inzecity.wordpress.com/2009/03/21/le-constat-inutile-du-week-end-le-metro-rend-les-gens-idiots/
http://inzecity.wordpress.com/2008/11/11/metro-du-matin-a-vue-de-nez-il-est-23h/
BRAVO et vivement le bus !!!
« Missinzecity
Ouiiiii !!!!
Une autre faune à explorer et toute aussi riche d’espèces communes : le bus.
Sur le même thème, voici deux liens (les miens) dans un style un peu différent
http://inzecity.wordpress.com/2009/03/21/le-constat-inutile-du-week-end-le-metro-rend-les-gens-idiots/
http://inzecity.wordpress.com/2008/11/11/metro-du-matin-a-vue-de-nez-il-est-23h/
BRAVO et vivement le bus !!! »
Je vais lire de suite, tu m’a donné une idée un comparatif bus de banlieue et funiculaire de centre ville (pléonasme)…
Trop excellents vos textes et style ! J’adoorreeeeeeeeee !
Merci
shanti
de monde en monde, toujours un métro
c’est un texte de terroriste … « lol »
de la part d’un homologue, c’est un compliment…
TSii!Tsi!Tsi!Tsi! Boum!Tsi!tsi!tsi! Boum!
Hein quoi????
il font gréve!!encore?????
Je vais échanger mon I phume mp3,par mon Guettoblaster!!!je vais pouvoir revendiquer Moi aussi mon RN’Bouze!!!
Le métro et ses cadavres…
La potence n’est pas haussmannienne mais guimardienne.
Tu arrives donc à regarder les gens.
Pas moi.
Dès qu’on le regarde, le type du métro devient agressif.
Très bien dit, et joliment ^^
On pourra y rajouter le requin en costar qui considère que son temps est plus important que celui de ses voisins, la mère de famille qui est persuadée que ses gosses sont adorables lorsqu’ils crient ou encore le random guy qui SAIT que s’adosser à la barre centrale est le meilleur moyen d’imposer sa domination dans ce milieu hostile…
La faune urbaine aux heures de pointe est un sujet intarissable et potentiellement plein d’intéret, quel dommage de devoir tout expérimenter par nous mêmes…
Le métro : un sujet à creuser…Particulièrement chez moi, à Saint-Etienne…
Et au fait les sociologues, quid du portrait du grand bourgeois ou du haut-fonctionnaire dans le métro ?…
Tant que les populistes disant que les pauvres sont des feignants pourront compter sur des essayistes qui organisent la nausée mutuelle en mettant le doigt au fonds de la gorge des classes moyennes, ceux-du dessus, ceux qui ne fréquentent pas le métro peuvent dormir tranquillement…
Sinon ça reste très agréable à lire, mais plus obscène et existentielle que véritablement instructif, un plaisir solitaire en somme…du type des seuls que l’on s’autorise dans le métro.
Adieu siatz.
Haha c’est une blague ? une parodie ? Morsay c’est toi ?
Les transports en commun à St té c’est mignon tout plein, j’avoue avoir vu peu de « grand bourgeois ou haut-fonctionnaire dans le métro ? » » à Vénissieux ou Vaux en Vélin, j’avoue préférer parler de ce que je connais.
Qui a parlé des riches ou des pauvres, personne, dans l’article, je parle des gens sans leurs coller une étiquette sociale, puisqu’elle ne détermine pas la nature des individus.
Désolé aussi mais je ne dispense pas de leçon, je trouve ça prétentieux, mais tu le fais bien mieux que moi.
Ceux qui parlent le mieux du populisme ce sont les populistes.
« La misère est plus belle au soleil et la révolution plus juste derrière un écran d’ordinateur. »
Adieu.
Bonjour,
Belle tentative, seulement, vous avez oublié une personne dans votre analyse.
Oui il y a le voisin A, le B le C mais ou est le patient 0, oui le patient témoin, celui qui observe, et analyse ces comportements.
Car au fond ce patient 0, il est à la fois observateur mais acteur. Alors critiquons un peu ces personnes qui passent leur temps dans le métro à observer les autres, qui disent rechercher la tranquillité tout en cherchant les petits travers des autres pour s’en délecter.
Cela finirait bien votre article et alors vous pourrez vous vanter d’avoir étudié une grande partie du panel des voyageurs, car au fond :
« Quand je dis « Les gens du métro », je pense à eux, là, assis à côté de vous. » serait plutot « Quand je dis « Les gens du métro », je pense à moi et à eux, là, assis à côté de moi. »
Prêt pour l’exercice?
Cette analyse est le principe même de ce blog !
Aaah une belle analyse du métro, et surtout, de ses occupants. Sujet d’ailleurs inépuisable que celui du métro parisien … je l’adore (ce sujet hein, le métro un peu moins =}).
Je suis dans le métro et je ris. Merci!